Aujourd'hui, les analyses critiques consacrées à Guy de Maupassant mettent l'accent sur l'étude du narrateur et laissent dans l'ombre le narrataire. Cette orientation de la recherche a été déterminée par un choix méthodologique : on a privilégié l'instance de production de l'œuvre et négligé le processus de sa réception. L'un des grands mérites de l'Ecole de Constance, c'est d'avoir inversé cette perspective d'analyse critique et d'avoir centré l'étude sur le destinataire. L'attitude de ce dernier, ses activités face au texte et la façon dont il l'interprète définissent un domaine de recherche en pleine expansion.
On s'intéresse de plus en plus aux indices de l'inscription du récepteur dans l'énoncé. On cherche à déterminer ses empreintes et à cerner les marques de sa participation à l'élaboration de la signification du texte.
[...] Elle a cette même fonction dans L'Inconnue, car l'héroïne du métarécit reste un être mystérieux et fascinant, et se présente même comme un personnage fantastique qui hante le narrateur sans cesse. Les différentes questions qui achèvent ce récit ne rassurent pas le lecteur, car elles ne lui révèlent pas la vérité, mais elles l'inquiètent et le bouleversent en l'engageant dans un univers magique : Qui est-elle ? Je ne le sais pas encore. [ . ] Qui est-elle ? Une Asiatique, peut-être ? Sans doute une juive d'orient, oui, une juive ! J'ai dans l'idée que c'est une juive. Mais pourquoi ? Voilà ! Pourquoi ? [...]
[...] Maupassant plonge donc son lecteur dans l'opacité d'une réalité mouvante. Il le pousse grâce aux différentes questions à chercher à élaborer une interprétation possible du comportement de cette héroïne. Il emploie ce même mode de narration dans La Folle : Que se passait-il dans cette âme désespérée ? On ne le sut jamais ; car elle ne parla plus. Songeait-elle aux morts ? Rêvassait-elle tristement, sans souvenirs précis ? Ou bien sa pensée anéantie restait-elle immobile comme de l'eau sans courant ? [...]
[...] La dynamique interne de ce texte est déterminée par l'effet de choc qu'engendre la clausule. Si le lecteur construit au cours d'une première traversée du texte un sens précis à partir des différentes données inscrites dans le métarécit, la dernière phrase de cette œuvre le contraint à réexaminer rétroactivement le récit métadiégétique et à reconstruire sa signification. Dans le métarécit, l'auteur décrit une expérience euphorique vécue par le héros qui établit une relation galante avec une jeune femme gaie et aimable mais en même temps superficielle et frivole. [...]
[...] Tout d'abord, nous notons que l'auteur évite de terminer certains récits en enchâssement. Il choisit volontairement de les laisser en suspens pour engager le lecteur à les compléter. Dans Un Parricide, il utilise cette technique narrative. Le jugement du tribunal n'est pas prononcé. Le lecteur reste indécis : il ne sait pas si le héros sera condamné, car il a tué son père et sa mère, ou acquitté, car il a pu justifier son crime dans son métarécit aveu L'auteur évite de proposer un jugement dans la clausule du conte et il se demande : Si nous étions jurés, que ferions-nous de ce parricide ? [...]
[...] Les Subtils Chroniques Union Générale d'Éditions tome II, p Ibid., p Maupassant, Le Roman Préface de Pierre et Jean, op. cit., p Ibid, p et 12. Maupassant, Romans in Chroniques, tome II, p (C'est nous qui soulignons). La lecture est dans les failles et les brisures [ . ] dis Michel Charles dans Rhétorique de la lecture, Éditions du Seuil p.247. [10]. p [11]. U. Eco dit : Parce qu'il est à actualiser, un texte est incomplet (Lector in Fabula ou la coopération interprétative dans les textes narratifs, Grasset p. 64). [12]. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture