Les faux monneyeurs, incipit, André Gide, Nouveau Roman, adultère
L'incipit d'une œuvre est souvent porteur de caractéristiques fortes pour le reste du roman et doit traditionnellement en plus que d'informer le lecteur, l'intéresser afin de nouer en quelque sorte, le pacte de lecture.
Ici, le commencement de l'œuvre de Gide, Les faux monnayeurs, semble se faire «in medias res» et recourir à des procédés particuliers, dont une approche assez théâtrale et novatrice. Ce qui explique pourquoi Gide fut considéré bien souvent comme l'un des précurseurs du Nouveau Roman. Le passage que nous allons étudier représente les tous premiers paragraphes du roman où Bernard découvre une ancienne lettre adressée à sa mère qui lui apprend être un fils d'adultère.
[...] Celui-ci est séparé des héros réalistes par son détachement d'un environnement, son extraction d'un cadre de vie. Cet incipit qui aurait pu être classique car présentant un cadre aussi bien spatial que temporel mais aussi une intrigue; présente un côté théâtral et novateur et ne laisse rien présager de la suite du roman. Le seul thème sera repris est celui du diable. Mais le futur proche des personnages est ouvert à une immensité des possibles pour l'intrigue mais aussi pour les procédés stylistiques et d'écritures à venir. [...]
[...] Le point de vue est bel est bien interne à Bernard étant donné que l'on a accès à ses pensées avec l'expression «Çà joue la larme, pensa t-il. Mais mieux vaut suer que de pleurer.» notamment. De plus cette «réplique» renforce le côté théâtral de l'incipit engagé dès la première ligne. Avec l'utilisation du verbe jouer et de la référence à une simulation de pleurs. Toute l'action et tout cet incipit sont centrés sur Bernard, il est d'ailleurs sujet de la majorité des phrases: «c'était bien de lui,Bernard, qu'il s'agissait». De plus, la lettre objet fort de l'incipit n'est pas présentée et elle n'est pas signée. [...]
[...] Bernard est construit comme un protagoniste «anti-réaliste»: il ne dépend en rien et son caractère lui-même ne dépend en rien de sa famille et de tous les éléments extérieurs qui agissent sur lui.L'incipit se clôt sur ce «Aussi bien j'en ai mon suffisant pour aujourd'hui» qui implique la notion d'un changement à venir seulement les possibilités sont nombreuses et en aucun cas cet incipit ne laisse présager les événements à venir. Pour conclure, il semble que cet incipit renforce l'idée d'un changement dans la littérature à partir de l'œuvre de Gide. Ce commencement des Faux-monnayeursprend pour référentiel unique le personnage de Bernard introduit dès les premières lignes. [...]
[...] En effet Bernard est extrait de son environnement, mis en avant en tant que personnage hors contexte. Il n'est vu que pour lui-même, son environnement est présenté mais est éloigné. Ainsi tous les gens de sa famille son occupés: son père et son frère «sont retenus», sa mère «en visite», sa sœur «à un concert» et Caloub est dans une «pension» qui le boucle. Bernard nous est présenté seul et les autres personnages sont comme retenus par l'auteur ou par une force extérieure. [...]
[...] Il n'y a qu'une initiale dont Bernard n'est même pas sur «un V qui peut aussi bien être un N». Bernard prononce alors un soliloque, qui lui même a ce côté théâtral. En effet la technique du soliloque est proche du monologue au théâtre comme dans un drame bourgeois par exemple. Le discours direct fait alors entendre la voix-même -les pensées- de Bernard. Le narrateur n'apporte aucun jugement sur Bernard ou ses choix, il le laisse envisager son futur propre et poser donc les bases de l'intrigue comme le veut le principe de l'incipit. [...]
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