La tension entre les nations européennes est déjà grande lorsque l'écrivain Charles Péguy récemment converti au catholicisme, publie en 1913 Tapisseries, triptyque poétique succédant à un autre recueil, les Mystères. Ce recueil, inédit dans sa présentation, reprend sous une forme écrite les motifs édifiants des tapisseries qui ornaient jadis les sanctuaires religieux. Le présent poème, extrait de la section Eve, dernier volet du recueil, est représentatif des intentions du poète : à partir du canevas d'un célèbre texte chrétien, il honore la mémoire des combattants morts pour leur pays.
[...] Ce recueil, inédit dans sa présentation, reprend sous une forme écrite les motifs édifiants des tapisseries qui ornaient jadis les sanctuaires religieux. Le présent poème, extrait de la section Eve dernier volet du recueil, est représentatif des intentions du poète : à partir du canevas d'un célèbre texte chrétien, il honore la mémoire des combattants morts pour leur pays. Comment fait-il l'éloge des hommes de guerre tombés pour la patrie ? Ce poème est assimilable, par sa forme et sa composition, à une prière religieuse. [...]
[...] Péguy enracine donc son discours dans les formes multiples de la prière chrétienne, mais cette supplication est-elle réellement adressée à Dieu ? Celui-ci, en effet, n'est jamais évoqué qu'à la troisième personne, et le pardon qu'on lui réclame n'est somme tout que rhétorique : le sort des combattants, déjà réglé, n'a nul besoin de la prière d'un poète. C'est la compréhension des hommes encore vivants que réclame le locuteur ; ce sont les pacifistes que le poète cherche à circonvenir, en conclusion d'un plaidoyer habilement argumenté. [...]
[...] Aussi le poète réclame-t-il le repos pour eux, à travers une frappante antithèse : Paix aux hommes de guerre Par la mort, ils deviennent de grands vainqueurs et la terre qu'ils ont défendue devient, par un subreptice glissement de sens, la terre qui va les recouvrir et qui doit leur assurer un dernier silence Dès lors, la mort de ces grand vainqueurs devient non seulement juste mais cohérente. Le dernier vers du poème prend alors la forme d'une péroraison : mourir pour sa terre, c'est boucler le cycle de l'existence humaine ; né de la terre c'est là son origine ayant vécu pour elle, le combattant conquiert, par la mort et l'inhumation, sa noblesse, symbolisée par une pauvre couronne Conclusion A partir d'un texte évangélique fondé sur le schéma simple de la répétition, Péguy construit un discours à la structure relativement complexe, reflet d'une conscience puissant aux racines de la chrétienté. [...]
[...] A la différence du sermon des Béatitudes le poète n'énumère pas tous ceux qui seront dignes d'une récompense divine : il restreint son discours à ceux qui sont morts Le poème est même structuré par la célébration de ces défunts, au moyen de la formule votive Heureux ceux qui sont morts reprise sept fois dans les trois premières strophes. Le poète implore la clémence divine pour ces hommes morts dans les grande batailles les projetant à l'instant du Jugement dernier, épisode fondateur de la pensée chrétienne, à travers l'image de Dieu qui, pourvu de la justice balance pèsera leurs actes. [...]
[...] Les références à la culture biblique Jalonné de références chrétiennes, ce poème s'inscrit dans une esthétique religieuse. Déjà, le procédé qui le fonde l'anaphore de la formule Heureux ceux qui - signale d'emblée un pastiche assumé du Sermon du Christ sur la montagne autrement appelé les Béatitudes Cette réécriture ne cherche donc pas à faire œuvre d'originalité. Pourtant, l'intention diffère : Charles Péguy ne se prend pas pour un avatar du Christ, et le sermon ressemble davantage à une supplication. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture