Bilbo le Hobbit commence par la célèbre phrase « dans un trou vivait un hobbit » : dès l'incipit, Tolkien ne perd pas de temps pour nous faire entrer dans son monde. Il ne cherche pas à construire un effet de réel comme dans le genre fantastique. Il nous plonge directement dans son imaginaire par le personnage du hobbit. L'Oxford English Dictionary consacre une entrée à ce nom inventé par Tolkien : « hobbit : membre d'un peuple imaginaire ressemblant aux humains, de petite taille et possédant des pieds couverts de poils. Mot inventé par l'écrivain britannique J. R. R. Tolkien (1892-1973) qui le définit lui-même comme habitant un trou. »
Dans une lettre adressée à R. W. Burchfield en date du 11 septembre 1970, Tolkien soumet lui-même deux définitions :
« Représentant d'un peuple imaginaire, variété de petite taille de l'espèce humaine, qui donnait à ses membres ce nom (signifiant « habitant d'un trou »), membres qui étaient toutefois appelés Semi-Hommes par les autres peuples, puisque leur taille atteignait la moitié de celle d'un homme ordinaire. »
« Cela implique que l'étymologie ne soit pas contestée. Si elle l'est, il pourra être nécessaire de modifier cette définition, par ex. de substituer, après « espèce » ; « les récits de J.R.R. Tolkien racontent qu'il s'est donné lui-même ce nom, alors que les autres peuples les appelaient... »
« Si elle n'est pas contestée, ce que je crois, même si l'on retrouve la trace d'une histoire soi-disant antérieure intitulée Le Hobbit, alors le « signifiant "habitant d'un trou" » pourrait être placé dans l'étymologie.»
[...] Le refrain : Voilà ce que déteste Bilbo Baggins ! renforce le comique de situation puisque Bilbo aime l'ordre et la délicatesse. Le narrateur insiste sur cette scène comique puisque Bilbo court derrière les Nains qui débarrassent la table en balançant d'une main des colonnes d'assiettes. Ils connaissent bien le caractère de Bilbo et ils énumèrent tout ce qu'il déteste. La liste est établie sur l'accumulation des impératifs : ébréchez les verres, fêlez les assiettes, émoussez les couteaux, tordez les fourchettes, brisez les bouteilles, brûlez les bouchons, coupez la nappe, marchez dans la graisse, versez le lait, laissez les os, éclaboussez de vin, déversez les pots, martelez-les, envoyez-les rouler Les Nains s'amusent à faire peur à notre héros en s'en prenant à ses biens matériels, ses biens les plus précieux. [...]
[...] Bilbo est tiraillé entre deux volontés. La première, qui est d'ailleurs dominante, est celle d'une vie facile, du repli sur soi, qui ne nécessite ni effort ni compréhension des autres, et qui est fondée sur la simple satisfaction des plaisirs immédiats. La seconde est un désir d'évolution vers une attitude plus adulte, plus concernée, plus humaine. Ainsi les nains de Bilbo le Hobbit ne sont pas les copies conformes des nains de Blanche Neige de Jakob et Wilhelm Grimm, conte publié en 1812 dans Les Contes d'enfants et du foyer. [...]
[...] Les travaux de forge auxquels se livrent les nains font aussi référence à Odin, dieu scandinave dont le nom signifie fureur Ses plus grands trésors étaient son coursier, Sleipner, son épée Gungnir et sa bague Draupner. Gungnir la frémissante - est la lance magique d'Odin, forgée par des Nains. Cette arme ne manque jamais sa cible et lorsqu'Odin se pendit à Yggdrasil, il fut transpercé par sa propre lance. D'ailleurs la hampe de Gungnir fut taillée dans l'arbre sacré et gravée de runes magiques. [...]
[...] Tolkien joue avec le lecteur : un personnage au caractère peu aventureux va participer à une aventure ; quant à la morale, Tolkien ménage le suspense par les points de suspension, puis rend le lecteur complice par un : vous verrez Dans un conte, on connaît la morale puisque c'est toujours la même : Tolkien s'amuse, non seulement avec le lecteur mais aussi avec la structure traditionnelle du conte merveilleux. Tolkien revient à son récit. Après cet aparté avec son lecteur, Tolkien reprend le fil de son récit. Il veut conter la suite de la généalogie de la famille de notre héros Il en vient à la mère du hobbit, mais c'est pour interrompre derechef le récit en narrant ce qu'est un hobbit. Tolkien utilise un procédé qui consiste à partir du particulier un hobbit pour arriver à la généralisation les hobbits. [...]
[...] Ce peuple insignifiant est plus malin que les hommes comme le souligne ironiquement le narrateur et n'a pas du tout les caractéristiques des héros : ils ont de l'embonpoint, ce qui prouve qu'ils aiment le confort et ne sont pas adaptés à une vie d'aventure remplie de privations ; ils aiment les couleurs vives : le vert et le jaune sont trop voyants pour se dissimuler lors d'une aventure. Leur particularité réside dans le pelage qui couvre leurs pieds dont la plante est couverte naturellement de cuir. Enfin, ce sont de bons vivants qui mangent régulièrement et rient de bon cœur. Les hobbits présentent donc toutes les caractéristiques d'un peuple inadapté à l'héroïsme, et Baggins n'échappe pas aux caractéristiques de son peuple. La double personnalité de Bilbo. [...]
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