Tout en apparaissant comme un des fondateurs de la modernité poétique, Apollinaire s'inscrit également dans l'a tradition de la poésie lyrique. Ainsi, des poèmes comme « La cueillette » ou « Adieux », publiés de façon posthume en 1925 dans le recueil Il y a, s'inspirent du thème du Carpe diem et de la fuite du temps présents déjà chez les poètes latins et repris au XVIe siècle par le chef de file de la Pléiade, Ronsard.
Le début du poème « Adieux », en particulier, peut apparaître comme une récriture du fameux sonnet de Ronsard « Quand vous serez bien vieille ... », extrait des Sonnets pour Hélène. Dans les deux poèmes, les poètes se mettent en scène et s'adressent à la femme aimée en se projetant dans un lointain avenir. Ils imaginent ainsi la vieillesse bien sombre de la femme et le sort qui leur sera à eux-mêmes réservé, en partie pour inciter la femme à céder à leurs avances mais aussi pour suggérer le rapport du poète au temps.
Comment ces deux poèmes exploitent-ils le thème de la fuite du temps?
[...] La fuite du temps Apollinaire comme Ronsard se projettent dans un avenir assez éloigné. D'emblée, Apollinaire semble s'inspirer nettement de son prédécesseur, car chaque poème s'ouvre par le verbe, être au futur, la scène imaginée se situe quand vous serez bien vieille ou lorsque [ . ] vous ne serez plus belle De façon générale, les verbes au futur simple sont omniprésents dans les deux poèmes, marquant ainsi une certitude quant à l'avenir évoqué. Ces verbes sont d'ailleurs souvent à des places fortes, en début de vers. [...]
[...] Ainsi, à la différence de la femme, la poésie et donc le poète lui-même semblent à même de se confronter au temps et d'en triompher Le triomphe du poète par et sur le temps Les deux: poèmes livrent une réflexion sur les rapports du poète au temps et proclament les pouvoirs de la poésie. Le temps loin 'd'être l'ennemi du poète lui assure la gloire selon Ronsard. Ainsi, c'est seulement le bruit de Ronsard qui dans ce futur éloigné provoquera l'étonnement de la moindre servante, la double négation dans les vers suivants: Lors vous n'aurez servante [ . ] qui [ . ] ne s'aille réveillant soulignant encore la grande popularité du poète. [...]
[...] Je serai sous la terre et Vous serez au foyer affirme Ronsard, les deux hémistiches se faisant écho. De même, Apollinaire remarque il reviendra parfois [ . ] un souvenir Le passage du temps apparaît d'autant plus important que dans les deux cas les poèmes semblent structurés par lui, ils débutent chacun par une proposition subordonnée circonstancielle de temps, dépendant d'une proposition introduite par le même adverbe temporel: lors chez Ronsard, alors chez Apollinaire. Les indices temporels sont en outre présents dans les deux poèmes, avec des termes comme demain aujourd'hui soir printemps. [...]
[...] Conclusion Ces deux poèmes reprennent ainsi de façon saisissante le motif de la fuite du temps pour tendre à leur muse un miroir effrayant de la vieillesse à venir. C'est pour Ronsard l'occasion d'inciter Hélène à profiter de sa jeunesse, à cueillir le jour, et implicitement à répondre favorablement à son amour. Apollinaire de façon plus sombre souligne davantage la déchéance des femmes pour prendre une forme de revanche sur celle qui le dédaigne. En tout cas, les deux poètes se plaisent à montrer leur triomphe sur le temps et la supériorité de la poésie en proclamant l'immortalité de leur création. [...]
[...] Et vous aurez alors des pensers ridicules. - C'est en dix-neuf cent un qu'un poète m'aima. Seule je me souviens, moi, vieille qui spécule, De sa laideur au taciturne qui m'aima. [ ] Guillaume Apollinaire, Il y Adieux (extrait), publication posthume Introduction Tout en apparaissant comme un des fondateurs de la modernité poétique, Apollinaire s'inscrit également dans la tradition de la poésie lyrique. Ainsi, des poèmes comme La cueillette ou Adieux publiés de façon posthume en 1925 dans le recueil Il y s'inspirent du thème du Carpe diem et de la fuite du temps présents déjà chez les poètes latins et repris au XVIe siècle par le chef de file de la Pléiade, Ronsard. [...]
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