Six ans avant que Luther expose ses 95 thèses, déclenchant la Reforme de 1517 en Allemagne, Erasme, humaniste et théologiens néerlandais, publie son Eloge de la Folie. Erasme, après une vie monastique où il accumule un savoir encyclopédique, est nommé prêtre à vingt-cinq ans ; son objectif est de porter l'humanisme à sa perfection par l'épanouissement de la religion chrétienne dans la tradition classique. Après un voyage à Rome qui l'a profondément déçu, il attribue tous les maux à la puissance temporelle des papes, qui s'incarne alors dans la figure de Jules II. L'Eloge de la folie illustre donc cette idée, par une série de discours solennels dressant un examen satirique des superstitions et des pratiques pieuses dans l'Eglise catholique face à des descriptions sincères des véritables idéaux chrétiens. On considère que c'est une des oeuvres qui a eu le plus d'influence sur la littérature du monde occidental et elle a été un des catalyseurs de la Réforme.
[...] Puis, il s'attache par la suite à dénoncer la vie de faste des papes qui vivent dans l'opulence au lieu de vivre dans la misère et le repentir. Enfin, il conclut en une critique virulente des moyens de coercition qu'utilise cette Eglise corrompue pour punir ce qu'elle appelle ses "ennemis". Pour ce faire, il se sert de la figure du Pape Jules II, cible parfaite pour sa démonstration. Erasme tente donc à travers cet essai d'exposer sa doctrine : pour être un bon chrétien, il faut vivre à l'image du Christ. [...]
[...] Ainsi, Erasme parvient-il à exposer sa philosophie, son exemple de vie simple, pieuse et respectueuse des traditions de la religion catholique. Sa doctrine de la Philosophia Christi est d'autant plus renfoncée qu'elle est mise en parallèle avec la vie de faste des papes. Il semble qu'Erasme par ce texte tente de confirmer les tendances de l'époque consistant à discréditer la papauté. Depuis 1468 le monde connait une période de mutation grandiose grâce à Gutenberg et l'invention de l'imprimerie. Ainsi, l'imprimerie a permis à Erasme de coucher sur le papier ce que le peuple chrétien pensait au sujet de la papauté. [...]
[...] Il s'est plus comporté en prince laïc qu'en souverain pontife. Cette attitude, liée à l'étalage des gloires mondaines, devait accroître les critiques des contemporains tels qu'Erame et justifier le mouvement de réforme radicale qui sera déclenché par Luther. Mais tous ne sont pas de cet avis, comme le souligne l'auteur, de "savants flatteurs ne manquent pas pour appeler cette folie manifeste, zèle, piété, courage . " (Ligne 53). En effet, Machiavel par exemple admire profondément Jules II, Le Prince et ses Discours, en faisant l'apologie du surhomme, libre de toute morale, montraient où l'on arrive fatalement lorsque le christianisme est banni de la vie privée comme de la vie publique et sociale. [...]
[...] Ainsi pour être parfait selon le Christ il faut se déposséder de ses biens et en faire dons, l'exact inverse de ce que font les papes en taxant impunément les chrétiens pour leur gloire et leur richesse personnelles. Erasme ne veut pas s'arrêter à la dénonciation de l'impôt, il souhaite dévoiler toutes les corruptions auxquelles se prête la papauté. La papauté a profité d'une période de flambée du macabre comme l'a appelé P. Chauru, qui sévissait à cette époque et qui a amené les populations à souffrir du danger du dernier instant, de l'horreur de l'au- delà, pour instaurer le système des indulgences (ligne 9). [...]
[...] Il est cependant intéressant de constater qu'Erasme fût fermement opposé à Luther et ne le suivit pas dans son projet de réforme de la religion chrétienne. Erasme a toujours prôné le fait de rester dans le giron du catholicisme, même s'il est conscient que le pouvoir de l'Eglise romaine doit être remis en question, pas fondamentalement mais dans son exercice. [...]
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