L'éducation sentimentale, Flaubert, rencontre amoureuse, incipit, négresse
Dans quelle mesure l'utilisation du topos romanesque de la scène de première rencontre amoureuse est-il traité de manière caricaturale, dans ses premières pages du roman, tout en étant important en ce qui concerne l'intrigue ?
Le texte se compose de trois mouvements :
-le premier, constitué par les trois premiers paragraphes et marqué par le pronom personnel « elle », correspond au portrait de Marie Arnoux, vue par Frédéric ;
-le deuxième, formé par les quatre paragraphes suivants et marqué par le pronom personnel « il », opère un retour sur les pensées et les impressions du protagoniste grâce au récit de pensées ;
-le troisième, constitué par les deux derniers paragraphes de l'extrait, présente la réunion des deux personnages qui, grâce à l'action de Frédéric, se parlent pour la première fois.
[...] C'est par son regard, il la regarda que le lecteur va accéder au portrait de la jeune femme. Il ne faut pas oublier que, dans les pages précédentes, il était précisé que Frédéric souhaitait devenir peintre ; il avait par ailleurs embarqué avec son matériel d'artiste. C'est effectivement comme un peintre qu'il va décrire Marie. -La description se fait du haut vers le bas. Elle comporte nombre de détails qui correspondent à ce que Roland Barthes a appelé les effets de réel Ils confèrent à la description son caractère vraisemblable. [...]
[...] Comme souvent, le décalage prend une valeur comique. Le comportement du protagoniste semble puéril face à la grandeur des sentiments qu'il éprouve. De même, le verbe planter souligne le caractère mécanique de ses gestes et crée cette fois un comique de geste. La mention du banc qui renvoie au début de l'extrait étudié, prouve qu'il a réussi à se rapprocher. Le souci de préciser la localisation demeure important. L' ombrelle est un élément proleptique et caractéristique par rapport à la relation entre Frédéric et Marie. [...]
[...] Le comique tend à critiquer une génération, dont le jeune homme est le représentant, qui, au lieu de vivre le réel, vit justement dans un univers fait de stéréotypes. Même si le sentiment est décrit comme sincère, la relation paraît vouée à l'échec. Il existe un contraste entre la vérité des sentiments et la facticité des clichés. Les héros dévorés par leurs illusions sont multiples dans les romans de Flaubert, de Madame Bovary à Bouvard et Pécuchet où le romancier poussera la caricature jusqu'à se moquer de lui-même en faisant de la dernière phrase de ce passage, Leurs yeux se rencontrèrent. [...]
[...] Le ton reste toujours moqueur comme le montre l'usage du verbe affecter qui indique que Frédéric n'est pas très courageux. Le fait d'observer une chaloupe objet sans grand intérêt, accroît le ridicule de sa situation. -Le récit de pensées suit la description. Les termes laudatifs splendeur séduction et finesse sont autant d'éléments qui confirment l'admiration que voue Frédéric à Madame Arnoux. Il est littéralement fasciné. Le syntagme nominal peau brune est une première allusion à l'esthétique de l'orientalisme, en lien avec le romantisme. [...]
[...] Flaubert se moque ainsi de son jeune protagoniste en montrant à quel point il est soumis aux clichés de son époque. -On trouve un écho au thème de la broderie, évoqué dans le troisième paragraphe, qui permet de renforcer la caricature. Frédéric est un amoureux transi qui éprouve le sentiment hyperbolique de l' ébahissement face à un objet utilitaire et banal, le panier à ouvrage L'outil de comparaison comme semble dénoncer cette confusion et participe au comique de la scène. [...]
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