Samuel Beckett est un écrivain, poète et dramaturge irlandais. Il est né à Foxrock, Dublin le 13 avril 1906 et est décédé à Paris le 22 décembre 1989. Toute son œuvre est traversée par une appréhension aigüe de la tragédie qu'est la naissance : « Vous êtes sur terre, c'est sans remède » dit Hamm, le personnage central de Fin de Partie et cette maladie semble incurable. Notre sujet d'étude, Fin de Partie, est la seconde pièce de Samuel Beckett à avoir été représentée. Crée en 1957, elle a d'abord été écrite en français puis traduite en anglais, afin d'en appauvrir au maximum la langue. Cette pièce en un acte met en scène quatre personnages, Hamm, Clov, Nagg et Nell, dans un lieu où le vide se dispute à l'infini du temps qui s'écoule dans une attente illimitée vers une fin incertaine.
"Fin de partie" évoque un univers de désolation déshumanisé où « quelque chose suit son cours ». Hamm est un aveugle paralysé qui demeure présent sur le plateau tout au long de la pièce. Clov, son fils adoptif, s'occupe docilement de lui et affirme vouloir partir définitivement. Deux poubelles font apparaître à quelques reprises le vieux couple Nell et Nagg, respectivement père et mère cul-de-jatte de Hamm.
L'extrait choisi se situe à la conclusion de l'œuvre, lors du dernier échange entre Hamm et Clov qui s'amorce avec une énième annonce de départ de la part de ce dernier : « je te quitte ». Nagg et Nell ont déjà disparu au fond de leur poubelle et n'apparaîtront plus. Hamm quant à lui annonce et met en scène sa mort.Tressée de cette attente de la mort, de cette anxiété du « finir », Fin de partie a donc pour but de représenter le « mourir », c'est-à-dire l'irreprésentable. Donnons au verbe « représenter » son sens théâtral : la mort, la vie sont un jeu, le « mourir » une « fin de partie » ; si la « partie (est) perdue », il reste à « finir de perdre » (p. 108). Or, le « mourir » est par définition inaccessible à la conscience ; en conséquence, on ne peut que le jouer, et peut-être jouer (pour s'en distraire) et s'en jouer (pour s'en moquer) en le jouant.
Nous verrons en quoi l'œuvre et plus particulièrement cet extrait, illustrent-ils le travestissement de l'expression de la finitude proposée par la tradition.
[...] , p. 108) disent la répétition, autant que l'infinie décomposition des derniers moments dans des gestes destinés à distraire l'attente ou à marquer le vide, comme si la pensée n'avait plus le goût, l'envie ou la force de se coordonner: Instants nuls, toujours nuls, mais qui font le compte, que le compte y est, et l'histoire close. (p. 109). On y trouve également des abords grotesques, ainsi qu'une double parole qui permet un décalage. La parole métathéâtrale Le mot rideau (p. [...]
[...] 110) qui signale que le rideau de scène doit se baisser indique la fin du spectacle, mais pas nécessairement la fin de la fiction. La pièce s'arrête juste avant que Hammn' approche (son) mouchoir de son visage (p. 110). Il n'est pas dit que Hamm soit mort et que vieux linge (p. 110) lui serve de suaire.Cet excipit peut même apparaître comme la fin d'un cycle dont on peut présager qu'il se renouvellera,que Hamm se réveillera et que Clov sera toujours à ses côtés. [...]
[...] 108), et les deux passages comportent un soliloque de Hamm ouvert par ces mots : À moi. ( ) De jouer. et108), Vieux linge ! et 110). Que le rideau s'abaisse sur le mouvement de Hamm approchant le mouchoir de son visage rappelle que la mort, trépas, fin suprême, reste irreprésentable. Il s'agit d'ailleurs moins de représenter la mort comme état, que le finir C'est la disparition d'une partie : d'un jeu ou de sa durée. Godot n'est qu'une nomination, il n'y a pas de référent hors-scène. [...]
[...] Le drame se joue sur un autre plan, plus symbolique : le mourant n'est plus que son âme. Et le corps ne demeure que, sous forme de traces qu'il a laissées sur l'âme, traces néfastes et sur lesquelles le malin construit son jeu. Le corps affaibli est une garde inutile pour l'âme. La mort est un passage, l'occasion de racheter une vie trop peu chrétienne, de faire finalement preuve de sa foi et de son humanité. Pour ceux qui demeurent, l'expérience de la mort est une manière de se préparer et d'affermir leur conviction. [...]
[...] Il ne demeure que le vide, que le néant là où siégeaient le jugement dernier et l'assurance d'un avenir meilleur. Le rien se réalise chez Beckett, c'est le résidu qui ne peut plus être réduit. [...]
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