Lecture analytique du passage "Une mère exemplaire" tiré d'Un barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras.
[...] Marguerite Duras, Un Barrage contre le Pacifique (1950) Etude L'apparence biographique du passage La sobriété du récit Marguerite Duras donne à ce récit, inséré dans le roman, toutes les apparences d'une biographie objective. Tout d'abord, le récit à la troisième personne est caractérisé par une grande sobriété. Les verbes font alterner classiquement les temps du passé : imparfait, passé simple et plus-que-parfait. Les phrases sont en majorité assez courtes, et beaucoup n'ont pas de subordonnées. Toutes se terminent par des points : aucune exclamation, aucune interrogation, aucun point de suspension ne donne une tournure émotive aux phrases. [...]
[...] Suzanne et Joseph étaient nés dans les deux premières années de leur arrivée à la colonie. Après la naissance de Suzanne, la mère abandonna l'enseignement d'état. Elle ne donna plus que des leçons particulières de français. Son mari avait été nommé directeur d'une école indigène et, disaient-elle, ils avaient vécu très largement malgré la charge de leurs enfants. Ces années-là furent sans conteste les meilleures de sa vie, des années de bonheur. Du moins c'étaient ce qu'elle disait. Elle s'en souvenait comme d'une terre lointaine et rêvée, d'une île. [...]
[...] Celles-ci sont le plus souvent simplement juxtaposées. Les repères temporels De plus, les événements choisis dans la narration ne concernent que les grandes étapes de la vie : naissance des enfants, mort du mari, activités professionnelles successives : enseignement d'Etat, cours particuliers, puis piano à l'Eden cinéma. Les repères temporels sont nombreux et clairement posés. Des intervalles de plusieurs années forment les jalons du récit : dans les deux premières années pendant deux ans dix ans (répété deux fois), attendre deux ans six ans . [...]
[...] Telle mère, telle fille Enfin, on peut constater que les deux femmes manipulent leurs souvenirs d'une façon très comparable. Marguerite duras explique en effet comment sa mère transforme au fil des récits et du temps l'aisance d'autrefois en opulence dont Joseph et Suzanne doutaient un peu On a l'impression que cette idéalisation du passé s'applique autant à la mère qu'à la fille. Elle s'en souvenait comme d'une terre lointaine et rêvée, d'une île : ces mots ne pourraient-ils pas tout autant concerner les souvenirs que Marguerite a de sa mère ? [...]
[...] En premier lieu, ce court récit insiste sur l'aspect exemplaire de sa mère. Elle abandonne son travail pour s'occuper de ses enfants du vivant de son mari. Cette épouse aimante idéalise son mari défunt : l'accumulation de termes valorisants met en relief cet attachement, et surtout la répétition des mots perfection et nouvel(les) La comparaison du souvenir de sa vie de couple à une terre lointaine et rêvée à une île est le seul passage poétique du texte. Dans les difficultés, la mère devient héroïque : Marguerite Duras valorise les efforts accomplis par le personnage maternel, dans la structure même des phrases. [...]
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