Commentaire composé du passage "La rencontre avec le riche chinois" tiré de l'oeuvre de Marguerite Duras L'Amant.
[...] Ces expressions sont d'ailleurs employées dans l'ensemble du roman, même quand les personnages se définissent avec une relative netteté pour la narratrice et pour le lecteur. L'ambiguïté de la figure masculine Elle tient au mélange de la séduction et de la timidité. Il appartient à la longue lignée des Don Juan par son âge, qui lui fait aborder une jeune fille adolescente, par sa richesse attestée, par des signes extérieurs typiques de l'époque : L'homme élégant est descendu de la limousine, il fume une cigarette anglaise En réalité, le trait dominant est la timidité, le malaise même. [...]
[...] Le rendu du dialogue est particulièrement travaillé. L'auteur emploie avec prédilection le style indirect en revendiquant la lourdeur inhérente à cette tournure : Elle lui dit qu'elle ne fume pas Alors il lui dit qu'il croit rêver Elle lui dit qu'elle est la fille de l'institutrice de Sadec Le style indirect reflète l'embarras des personnages et la banalité des propos affectant cette première rencontre. L'échange adopte parfois le discours direct, mais sans signes de ponctuation, afin de mieux se fondre dans le flux narratif, sans cette claire démarcation entre l'auteur qui raconte et le personnage qui parle : Elle ne lui dit pas laissez-moi tranquille ou Alors il lui demande : mais d'où venez-vous ? [...]
[...] Conclusion Cet extrait d'un roman autobiographique de Marguerite Duras montre comment le topos le plus répandu de la littérature romanesque, celui de la première rencontre amoureuse, peut être transformé, voire perverti. La perspective autobiographique, la volonté de s'interroger, de sonder le passé exacerbent les tendances stylistiques de l'auteur, déjà enclin à souligner l'impuissance de l'impression à restituer une relation amoureuse. Cette voie du roman moderne est amplifiée par le cadre choisi, celui du colonialisme, par l'ambiguïté des personnages partagés entre l'idéal amoureux, le confort des conventions et l'ambition sociale. Transparent et double à la fois, ce texte montre qu'il n'y a pas plus de vérités des êtres que de l'écriture. [...]
[...] La tenue vestimentaire de l'héroïne masque le manque d'argent en affichant une originalité criarde. La situation de la mère institutrice, étant insuffisante, l'a poussée dans des opérations financières désastreuses comme le suggère avec délicatesse l'homme : Il ne réfléchit pas puis il dit qu'il a entendu parler de cette dame, sa mère, de son manque de chance avec cette concession qu'elle aurait achetée au Cambodge Enfin, l'ambiguïté psychologique des personnages intériorise les tensions du monde extérieur. L'homme est riche mais faible ; sensuel, mais finalement prompt à se laisser guider par les conventions. [...]
[...] Marguerite Duras, L'Amant, (La rencontre du riche Chinois) Introduction Marguerite Duras occupe une place particulière dans la production romanesque contemporaine. En effet, dès 1950, date de publication d'Un Barrage contre le Pacifique, elle délaisse les canons habituels de l'écriture romanesque (narration, description, rendu des personnages) au profit d'un style fondé sur la primauté du dialogue, qui tente de restituer un monde intermédiaire, entre le dit et le non-dit des pensées souterraines de chacun. Ces lignes de force s'affirment particulièrement dans cet extrait de L'Amant, roman autobiographique publié en 1984, qui évoque les amours d'une jeune fille blanche et d'un riche banquier chinois au Viêt-Nam français. [...]
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