Au XVIIe siècle, Molière s'empare du mythe de Don Juan. La pièce de théâtre représentée pour la première fois le 15 février 1665 remporte un très grand succès. Cependant, elle est censurée dès le deuxième jour par la compagnie du Saint Sacrement qui fit cabale pour « faire supprimer cette méchante comédie ». En effet, Don Juan, le personnage principal peut choquer dans la mesure où il ne correspond pas toujours aux valeurs du héros traditionnel.
C'est un personnage total, à la fois héros et antihéros: il est tour à tour médiocre et grandiose, ridicule et éblouissant. On ne sait s'il brave Dieu par orgueil, par obstination ou par lassitude. Est-il un héros libre et fier ou un marginal hors-la-loi et traqué, à moitié ruiné, vieux avant l'âge et brûlant ses derniers feux ?
[...] Lorsque Mathurine surprend Don Juan en compagnie de Charlotte, celle-ci demande des explications. Il entame alors un double dialogue en faisant croire à chacune que l'autre ment. Il se trouve piégé par les deux femmes, mais persiste dans son mensonge ; c'est un menteur effronté. De plus, il fait preuve d'insolence lorsqu'il se permet, malgré les réticences de son valet, de visiter le tombeau du commandeur, un homme qu'il a tué sans scrupules. Cela porte atteinte au repos du mort. [...]
[...] Don Juan déçoit tout autant qu'il peut fasciner. Son audace relève de la vaillance comme de l'inconscience. Ses victoires mêmes sont des guerres faciles : il abuse facilement deux paysannes, un petit bourgeois, un valet ignorant, un père inquiet et aimant mais il est en échec devant la lucidité de Done Elvire, la foi du pauvre et l'omniscience du Ciel. On peut se demander si le personnage est réellement maître de sa vie et de sa mort, auquel cas celle-ci serait en fait un suicide, ou s'il mène une vie de hasard, comme le suggèrent ses séductions improvisées des jeunes paysannes d'où me vient, la belle, une rencontre si agréable ? [...]
[...] Don Juan est un personnage hors du commun. Personnage insaisissable, il peut susciter aussi bien le dégoût que l'admiration. Quoi qu'il en soit, il ne laisse aucun lecteur indifférent. Ses défauts, qui devraient l'éloigner du héros traditionnel, au contraire le transforment en un héros plus proche des hommes. C'est en grande partie la complexité du personnage qui a permis le succès du mythe de Don Juan ; chaque acteur réinterprétant à sa manière la personnalité du héros. Aujourd'hui encore, Don Juan continu à séduire et fasciner. [...]
[...] Cet antihéros est également un athée, qui transgresse le Ciel et ne croit qu'en deux et deux sont quatre et en quatre et quatre sont huit Même lorsqu'un spectre lui apparaît et lui parle, il continue à nier l'existence du Ciel en répondant à Sganarelle qu'il pense connaître cette voix. Don Juan apparaît comme un danger pour la société car il refuse également de payer ses dettes envers Monsieur Dimanche. On peut donc dire qu'il transgresse les règles sociales, religieuses ainsi que celles imposées par la noblesse. Il refuse de régler sa conduite comme le nécessiterait son rang. Pour parvenir à ses fins, il est capable des pires bassesses. Sa vie n'est que mensonge, tromperie, provocations indécentes, chantage et intimidation. [...]
[...] Il transgresse seul les lois de ces ancêtres et de la société. Il affirme haut et fort sa marginalité en affichant sa liberté d'esprit et de mœurs, par ses répliques telles que je ne crois qu'en deux et deux sont quatre ou encore la constance n'est bonne que pour les ridicules Il s'en prend aussi aux médecins et aux dévots. C'est un personnage solitaire qui lutte contre la société entière dans laquelle il vit. Même jusqu'à sa mort, il aura défendu ses valeurs avec courage. [...]
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