La longueur des répliques de Sganarelle, qui se lance dans deux tirades successives, laisse à penser qu'il est le maître de la discussion. Juste avant cet extrait, le valet affirme se sentir « en humeur de disputer », c'est-à-dire de soutenir un débat. Il se sent en verve, et reproche même à Don Juan par la suite de ne pas respecter les règles de la dispute : « je ne saurais disputer, si l'on ne m'interrompt » (...)
[...] Molière, Dom Juan, III : Don Juan et Sganarelle face à la religion Texte étudié SGANARELLE: Je veux savoir un peu vos pensées à fond. Est-il possible que vous ne croyiez point du tout au Ciel? DOM JUAN: Laissons cela. SGANARELLE: C'est-à-dire que non. Et à l'enfer? DOM JUAN: Eh! SGANARELLE: Tout de même. [...]
[...] La croyance religieuse Cette scène dévoile, à travers le dialogue de Don Juan et de Sganarelle, leurs croyances respectives. L'impiété de Don Juan L'impiété de Don Juan est au centre de la discussion, car elle est l'un des enjeux majeurs de la pièce. Les pensées de Don Juan se résument à une phrase, laconique, aux allures de sentence avec le présent de vérité générale et la construction en deux temps : je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit Cette assertion refuse le débat sur la croyance, en se situant du côté de la réalité mathématique, étrangère à cette notion. [...]
[...] DOM JUAN: Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit. SGANARELLE: La belle croyance et les beaux articles de foi que voilà! Votre religion, à ce que je vois, est donc l'arithmétique? Il faut avouer qu'il se met d'étranges folies dans la tête des hommes, et que, pour avoir bien étudié, on en est bien moins sage le plus souvent. Pour moi, Monsieur, je n'ai point étudié comme vous, Dieu merci, et personne ne saurait se vanter de m'avoir jamais rien appris; mais, avec mon petit sens, mon petit jugement, je vois les choses mieux que tous les livres, et je comprends fort bien que ce monde que nous voyons n'est pas un champignon qui soit venu tout seul en une nuit. [...]
[...] Le refus du dialogue Don Juan parle extrêmement peu. Il commence par rejeter le sujet de la discussion, laissons cela puis se contente de monosyllabes : eh ! oui ah ! Ses répliques n'offrent pas de sens explicite, et c'est Sganarelle qui va se charger de les traduire : c'est-à-dire que non tout de même aussi peu créant un échange qui n'existe pas réellement. Il est cependant à noter que le silence de Don Juan peut en partie s'expliquer par la mauvaise tournure des questions de Sganarelle : si le refus de croire au Ciel est admis, le refus de croire à l' enfer son corollaire, au diable lié à l'enfer, et à l' autre vie semble déjà admis. [...]
[...] La scène première de l'acte III est cependant capitale dans l'économie de la pièce, car si Don Juan a été dès le début présenté comme un impie, c'est dans cette scène centrale que son impiété doit être affirmée, préparant la suite des événements. Sganarelle interroge Don Juan sur ses croyances, en voulant l'obliger à se dévoiler. Nous allons donc étudier le dialogue entre le maître et le valet, afin de dégager les rapports de force. Puis nous analyserons le traitement du thème de la foi dans ce passage, avec les deux thèses en présence, avant d'en examiner le registre littéraire, qui permet de saisir l'enjeu de ce passage au XVIIème siècle. I. [...]
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