Comme Dante ou Goethe, Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière (1622 - 1673), incarne le génie propre d'une langue et d'une culture nationales : il n'est pas d'auteur plus français que lui. Mais il n'est pas non plus d'auteur plus universel : comme Cervantès ou Chaplin, il incarne le rire dans sa puissance souveraine, qui transcende frontières et époques. Enfin, en matière de théâtre, son oeuvre, avec celle de Shakespeare, constitue la référence absolue : pour tous les comédiens du monde, Molière demeure le « patron » (...)
[...] Ainsi, cette scène voit Sganarelle intervenir deux fois suite à la demande de son maître (lignes 15 et 76-77). Un provocateur du Ciel Le libertin de mœurs se complète ici d'un libertin d'esprit, bafouant la morale chrétienne et blasphémant. Alors qu'il sait pertinemment son hypocrisie, il ne cesse d'en appeler au Ciel et à Dieu pour accréditer ses intentions : Dieu m'en garde ! (ligne Vous méritez sans doute une meilleure fortune, et le Ciel, qui le connaît bien, m'a conduit ici tout exprès pour empêcher ce mariage (lignes 54-55), Que le Ciel . [...]
[...] Monsieur, tout ça est trop bien dit pour moi, et je n'ai pas d'esprit pour vous répondre. DOM JUAN. Sganarelle, regarde un peu ses mains. CHARLOTTE. Fi ! Monsieur, elles sont noires comme je ne sais quoi DOM JUAN. Ha ! que dites-vous là ? Elles sont les plus belles du monde ; souffrez que je les baise, je vous prie. CHARLOTTE. Monsieur, c'est trop d'honneur que vous me faites, et si j'avais su ça tantôt, je n'aurais pas manqué de les laver avec du son. DOM JUAN. [...]
[...] Non, Monsieur ; mais je dois bientôt l'être avec Piarrot, le fils de la voisine Simonette. DOM JUAN. Quoi ? une personne comme vous serait la femme d'un simple paysan ! Non, non : c'est profaner tant de beautés, et vous n'êtes pas née pour demeurer dans un village. Vous méritez sans doute une meilleure fortune et le Ciel, qui le connaît 55 bien, m'a conduit ici tout exprès pour empêcher ce mariage, et rendre justice à vos charmes ; car enfin, belle Charlotte, je vous aime de tout mon cœur, et il ne tiendra qu'à vous que je vous arrache de ce misérable lieu, et ne vous mette dans l'état où vous méritez d'être. [...]
[...] Paradoxalement, cette scène voit Dom Juan, libertin profondément immoral, se faire le chantre de la moralité. II- Des informations complémentaires sur Dom Juan Jusqu'à présent, le lecteur a découvert en Dom Juan un séducteur peu respectueux de ses conquêtes. Cette scène va préciser son caractère en donnant des informations complémentaires. Un séducteur rudimentaire Pour Dom Juan, l'amour est un jeu, une comédie, il ne tient absolument pas compte des sentiments. Non pas vulgaire, mais sa stratégie révèle des arguments caricaturaux et sans reliefs, comme : - le compliment sur les mains de Charlotte. [...]
[...] 25 CHARLOTTE. Charlotte, pour vous servir. DOM JUAN. Ah ! la belle personne, et que ses yeux sont pénétrants ! CHARLOTTE. Monsieur, vous me rendez toute honteuse. DOM JUAN. Ah ! n'ayez point de honte d'entendre dire vos vérités. Sganarelle, qu'en dis-tu ? Peut-on rien voir de plus agréable ? Tournez-vous un peu, s'il vous plaît. Ah ! 30 que cette taille est jolie ! Haussez un peu la tête, de grâce. [...]
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