En 1665, Molière, qui est à la fois auteur, chef de troupe et acteur, connaît d'importantes difficultés, liées essentiellement à l'interdiction de Tartuffe qui a découlée de la cabale des dévots ; le choix de sa nouvelle pièce se porte alors sur un sujet très populaire qui devrait lui permettre de renflouer son théâtre : la légende de Don Juan (...)
[...] Introduction En 1665, Molière, qui est à la fois auteur, chef de troupe et acteur, connaît d'importantes difficultés, liées essentiellement à l'interdiction de Tartuffe qui a découlée de la cabale des dévots ; le choix de sa nouvelle pièce se porte alors sur un sujet très populaire qui devrait lui permettre de renflouer son théâtre : la légende de Don Juan. Ce mythe moderne repose sur le personnage d'un grand seigneur libertin qui évolue dans un univers baroque où tout n'est que mouvement et instabilité. [...]
[...] Une grande partie de la tirade est consacrée à la séduction elle-même. La femme est présentée comme un ennemi dont il faut triompher, Don Juan cherche une âme qui peine à rendre les armes Le champ lexical de la guerre est largement développé : réduire combattre rendre les armes forcer pied à pied résistances oppose vaincre Ce sont les efforts à faire pour l'amour qui plaisent à Don Juan, dont la tirade s'achève sur l'expression conquêtes amoureuses il se sent comme un militaire en campagne, et méprise l'inaction : nous nous endormons dans la tranquillité La tirade de Don Juan a une forte visée argumentative : le héros y définit sa conception de l'amour, justifie sa conduite et se défend des accusations. [...]
[...] Les inclinations naissantes, après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l'amour est dans le changement. On goûte une douceur extrême à réduire, par cent hommages, le cœur d'une jeune beauté, à voir de jour en jour les petits progrès qu'on y fait, à combattre par des transports, par des larmes et des soupirs, l'innocente pudeur d'une âme qui a peine à rendre les armes, à forcer pied à pied toutes les petites résistances qu'elle nous oppose, à vaincre les scrupules dont elle se fait un honneur et la mener doucement où nous avons envie de la faire venir. [...]
[...] Un grand seigneur Don Juan apparaît tout d'abord comme un aristocrate. Sa prestance et son éloquence contrastent avec celles du valet présent sur scène depuis le début. Sa prise de parole est brillante, sa tirade est bien construite, dans un registre de langue soutenu, avec du vocabulaire juridique et de nombreuses expressions galantes : inclinations naissantes charmes inexplicables plaisir de l'amour transports ou encore larmes et soupirs Il est donc bon orateur et sa parole acquiert une certaine grâce poétique. [...]
[...] Ce caractère est attendu par le spectateur qui connaît le mythe et identifie Don Juan à ses nombreuses conquêtes. Son discours en fait aussi un personnage paradoxal, en proie à un perpétuel désir toujours inassouvi car lié à l'attrait de la nouveauté et du recommencement. Surtout, Molière qui, pourtant pressé par le besoin d'argent n'avait pas eu le temps d'écrire une pièce versifiée, a travaillé sa prose et su attribuer à son héros des propos brillants qui en font un véritable séducteur, capable de fasciner même les plus hermétiques à son amoralité, tel Sganarelle qui lui répond : vous tournez les choses d'une manière, qu'il semble que vous avez raison Le caractère flamboyant et splendide du Don Juan de Molière ne se démentira pas au cours de la pièce, et c'est ce qui en fait, malgré le châtiment final conforme à la légende écrite par ses prédécesseurs, une figure intemporelle de la séduction. [...]
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