Déçu par l'infidélité de ses deux compagnes successives, condamné pour avoir fait preuve d'esprit critique puis innocenté, victime de la jalousie de l'Envieux, lauréat du prix de générosité puis nommé premier ministre et adulé par la population, Zadig exerce sa fonction et doit trancher des questions d'ordre général et privé, et notamment religieuses. Ce chapitre offre une illustration de la sagesse de la gouvernance de Zadig. En effet, celui-ci tranche un débat passionné d'une manière très simple, prouvant ainsi son mépris pour les rites et la superstition, et la population l'acclame (...)
[...] La femme de l'envieux s'y présenta des premières ; elle lui jura par Mithra, par Zend-Avesta et par le feu sacré, qu'elle avait détesté la conduite de son mari ; elle lui confia ensuite que ce mari était un jaloux, un brutal ; elle lui fit entendre que les dieux le punissaient en lui refusant les précieux effets de ce feu sacré par lequel seul l'homme est semblable aux immortels : elle finit par laisser tomber sa jarretière ; Zadig 45 la ramassa avec sa politesse ordinaire, mais il ne la rattacha point au genou de la dame ; et cette petite faute, si c'en est une, fut la cause des plus horribles infortunes. Zadig n'y pensa pas, et la femme de l'envieux y pensa beaucoup. D'autres dames se présentaient tous les jours. Les annales secrètes de Babylone prétendent qu'il succomba une fois, mais qu'il fut tout étonné de jouir sans 50 volupté, et d'embrasser son amante avec distraction. Celle à qui il donna, presque sans s'en apercevoir, des marques de sa protection, était une femme de chambre de la reine Astarté (11). [...]
[...] Il trouva ainsi le secret d'expédier le matin les affaires particulières et les 30 générales ; le reste du jour, il s'occupait des embellissements de Babylone ; il faisait représenter des tragédies où l'on pleurait et des comédies où l'on riait ; ce qui était passé de mode depuis longtemps, et ce qui fit renaître parce qu'il avait du goût. Il ne prétendait pas en savoir plus que les artistes ; il les récompensait par des bienfaits et des distinctions, et n'était point jaloux en secret de leurs talents. Le soir, il amusait beaucoup 35 le roi, et surtout la reine. Le roi disait : Le grand ministre ! la reine disait : L'aimable ministre ! [...]
[...] Mais Zadig, toujours très distrait, prononça le nom d'Astarté. La dame, qui dans ces heureuses circonstances interprétait tout à son avantage, s'imagina que cela voulait dire : Vous êtes plus belle que la reine Astarté ! 60 Elle sortit du sérail de Zadig avec de très beaux présents. Elle alla conter son aventure à l'envieuse, qui était son amie intime : celle-ci fut cruellement piquée de la préférence. Il n'a pas daigné seulement, dit-elle, me rattacher ma jarretière que voici, et dont je ne veux plus me servir. [...]
[...] De plus, la réponse de Zadig est du plus grand comique. Elle est brève, s'opposant ainsi à la longue montée de l'attente des habitants (au bord de l'explosion sociale), simple et fait honte aux deux partis par son caractère grotesque (ce n'est pas très digne d'entrer dans un lieu sacré en sautant à pieds joints). Si la première querelle (celle de Mithra) séduit le lecteur friand de conte oriental, la seconde (celle des mages) est une allusion aux religions de la société de son temps et sert surtout à la critique (sorte de passerelle entre l'Orient et la société française) : elle doit conduire le lecteur à s'interroger sur ses propres croyances et pratiques. [...]
[...] Le style biblique est désigné par Voltaire comme le bon style oriental. Ce qui est critiquable dans ce commentaire, c'est la prépondérance donnée aux images, à la beauté du style en général. La Bible semble ainsi être assimilée à de la poésie. - Zadig : apologie de la philosophie des Lumières Zadig s'oppose aux superstitions et prône le déisme, culte de la divinité reposant sur la raison. Le philosophe ne privilégie aucune des sectes ni aucun des mages, il se veut être réconciliateur. [...]
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