Le marquis de Croismare, contraint en 1760 de retourner en Normandie pour quelques affaires, manque très vite à ses amis, notamment à Diderot, qui au bout d'un an d'absence envisage un stratagème pour le faire revenir. Il a alors l'idée facétieuse, en 1760, de lui adresser des lettres prétendument écrites par une religieuse qui implore son aide. Le marquis tomba dans le piège, et une correspondance s'ensuivit (...)
[...] Les religieuses tentent de convaincre plutôt que de forcer Suzanne à faire ses vœux. Les autres, plus éloignés de Paris, sont perçus comme le lieu de l'absolutisme et pour certains de la violence. Ils comportent d'ailleurs leur propre cachot. On découvre ainsi qu'à l'emprisonnement des corps répondent l'emprisonnement des esprits que nous étudierons un peu plus tard. C'est également par le biais de descriptions quasi naturalistes que Diderot fonde son roman et sa vraisemblance, afin de mener au mieux sa critique. [...]
[...] Suzanne, candide, ne comprend pas ces gestes, et y prend quelques plaisirs, ne sachant comment obéir à son confesseur qui lui conseille de s'en éloigner : le moyen de se refuser à des choses qui font grand plaisir à une autre dont on dépend entièrement, et auxquelles on n'entend soi-même aucun mal ? L'aveuglement de la jeune religieuse lui fait même prendre l'orgasme de sa supérieur pour une maladie, et pense que son mal est contagieux, se sentant en prise à de nouvelles sensations. [...]
[...] C'est tout de même la voix de Diderot qui se fait entendre le plus. L'auteur veut ainsi nous persuader que la cause des désordres ne réside pas dans la personnalité des bourreaux, mais dans le couvent lui même, et dans la société. La mère de Suzanne est perçue comme une victime, abandonnée par un amant et soumise à un mari sévère, les religieuses changent de comportement selon le bon vouloir de leurs supérieures, et il apparaît qu'elles ne sont manifestement pas mauvaises en soi. [...]
[...] Ce sont ensuite les lieux qui permettent à l'auteur de construire sa satire. Les couvents sont représentés comme des lieux sinistres et clos. Suzanne passe par deux types de prisons : la maison de ses parents et le couvent. La famille de Suzanne nous apparaît comme cruelle. Sa mère semble dure et froide, son père ne semble pas l'aimer, et la violence à l'égard de la jeune femme est rapidement évoquée. Les six mois qui séparent sa sortie de Sainte-Marie de son entrée à Longchamp se passent ainsi dans une cellule familiale. [...]
[...] Dans un premier temps, nous verrons en quoi les personnages et le décor contribue à mener une critique efficace des couvents. Dans un second temps, nous pourrons souligner le fait que l'auteur met en avant les principaux maux physiques ou moraux, que provoque la claustration chez l'individu, notamment la torture physique, la folie et l'aliénation mentale. Enfin, nous constaterons que cette crique du convent est révélatrice de la pensée des Lumières, et qu'elle met en avant une double dénonciation. On découvre en effet, la critique d'une société autoritaire et arbitraire qui nie la sexualité et l'identité de la femme. [...]
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