Descartes commence dans un premier temps à formuler le problème qu'il se propose d'examiner : il le présente sous la forme d'une alternative claire et radicale. Il lui est alors possible de faire apparaître dans un deuxième temps les implications aberrantes de la thèse qui identifie le souverain bien à la joie et par là il procède à sa réfutation. Tout le texte est écrit à la première personne (« je me suis proposé », « si je pensais », « j'approuverais », « j'avoue », « je n'approuve point»), ce qui semble impliquer une forte implication de l'auteur dans ses propos (...)
[...] Cela permet de comprendre pourquoi devoir son bonheur à l'ignorance ou à l'illusion est néfaste : d'abord parce que cela nous rabaisse au rang de l'animal, ensuite parce qu'un tel bonheur n'est en rien un bonheur véritable. Ainsi la connaissance nous est-elle apparue comme la condition essentielle d'un bonheur durable et complet. La connaissance, la compréhension exacte de l'ordre du monde permet de ne pas sombrer dans une vie de jouissance en confondant le bonheur avec le plaisir éphémère. La satisfaction que nous procure la pensée est le bonheur complet que l'homme doit viser sans se tromper d'objet. [...]
[...] C'est la raison pour laquelle la conception qui identifie le bonheur au plaisir est si discutable. La sensation de plaisir est trop brève et surtout elle peut accompagner les activités les plus nuisibles à la santé à long terme, ce qui loin d'en faire un moyen efficace du bonheur, en fait un obstacle. Ainsi le philosophe Épicure estimait-il que tout plaisir n'est pas à rechercher, bien que le plaisir est un bien. Cela parce que certains plaisirs sont suivis de plus grand déplaisirs encore et qu'au lieu de favoriser l'équilibre du corps ou le repos, la tranquillité de l'âme, ils les bouleversent. [...]
[...] Ce qui dépend de notre liberté, c'est de choisir une vie vertueuse dans laquelle l'homme soit satisfait de développer une activité digne de lui. Transition : Après avoir rejeté la vie de jouissance comme indigne de l'homme, après avoir distingué le bonheur durable du plaisir éphémère, le véritable contentement de l'esprit de la joie illusoire, il reste à montrer pourquoi il faut faire le sacrifice du plaisir. L'illusion que nous fournit le plaisir ne procure-t-elle pas un commencement de vie heureuse ? Pourquoi vaut-il mieux réellement avoir davantage de connaissances et moins de plaisirs ? [...]
[...] Plus précisément, étant donné que parfois la connaissance peut procurer de la tristesse, cela doit-il nous retenir de la considérer comme un bien absolu ? Doit-on considérer comme négligeable le fait que certains de nos états joyeux découlent de l'ignorance où nous sommes et estimer que ce qui compte le plus, c'est de se sentir content ? Faut-il au contraire être plus exigeant et préférer une vie moins insouciante et joyeuse mais plus lucide et plus satisfaisante consacrée à la connaissance ? [...]
[...] On n'échappe pas à la tristesse en se réfugiant dans des paradis artificiels, au contraire, ceux-ci nous y conduisent inéluctablement. Le résultat est donc inverse de celui qu'on escomptait. Alors que la tristesse n'est qu'une conséquence possible de la connaissance de la vérité, elle est une conséquence inévitable de l'erreur et de l'illusion : celui qui néglige la vérité en recherchant le plaisir à tout prix, celui qui estime que le plaisir vaut absolument, celui-là fait nécessairement son propre malheur. [...]
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