Depuis que le couvent est informé du procès, Suzanne subit mortifications et sévices. Sa constance fait naître la haine parmi les autres religieuses, haine attisée par la mère supérieure. Le grand vicaire vient ramener l'ordre. On prépare Suzanne à apparaître devant lui telle qu'on l'a décrite, c'est-à-dire folle, possédée. Pour Diderot, la mère supérieure incarne l'injustice, car elle veut fausser l'opinion du vicaire, et l'oppression, car elle veut imposer une attitude à Suzanne. Diderot souhaite susciter l'indignation du lecteur.
[...] La composition du passage souligne son importance dramatique L'effet d'annonce Au début du paragraphe, le présentatif voici et le superlatif le plus terrible annoncent ce qui va suivre comme particulièrement digne d'intérêt : Voici le moment le plus terrible de ma vie De même, l'apostrophe au destinataire et l'exhortation contenue dans l'impératif ont pour but de renouveler l'attention du lecteur : car songez bien, monsieur C'est un moyen simple de mettre en valeur un moment, qui se distingue des autres par le complément du superlatif de ma vie : le lecteur doit apprécier l'intensité de ce nouveau moment. Le style direct Le style direct signale qu'il s'agit d'un grand moment dans le récit. Les paroles sont peu nombreuses, et toutes intégralement rapportées. [...]
[...] Mais cette illusion terrifiante est à l'opposé de la charité qu'on attend d'une religieuse, ou de n'importe quel être humain. Le plus grave, c'est qu'en terrorisant ainsi Suzanne, elles se mentent à elles-mêmes en croyant servir Dieu : ah ! les méchantes créatures que des femmes recluses, qui sont bien sûres de seconder la haine de leur supérieure, et qui croient servir Dieu en vous désespérant ! Diderot, on le voit, ne perd pas de vue l'idée générale : le couvent est une institution qui gâte la nature humaine. [...]
[...] A ces questions, la supérieure ne répond que partiellement. Ici, la parole n'est pas un moyen de défense pour Suzanne, contrairement aux autres passages du roman ; en revanche, la parole de la supérieure exprime bien sa domination, domination figurée par la perte de la parole de Suzanne : ma bouche était ouverte, et il n'en sortait aucun son La relation des événements Elle suit l'ordre chronologique. Le récit à la première personne permet de confier la description de l'effet de la terreur à celle à qui cette terreur est imposée. [...]
[...] La terreur Le procédé des religieuses Dans le langage classique, de la tragédie mais aussi dans le roman, le mot terreur a beaucoup plus de force qu'aujourd'hui. Cette valeur la plus intense du mot apparaît deux fois dans le premier paragraphe : moment le plus terrible (adjectif, signifiant qui inspire de la terreur ; On crut qu'il n'y avait qu'une forte terreur qui pût me montrer dans cet état (sorte de superlatif). La terreur est si forte qu'elle conduit le personnage à l'évanouissement. [...]
[...] Soit sur le moment, soit plus tard, Suzanne est très attentive à ces trois niveaux : Diderot lui donne sa propre sagacité de philosophe. La curiosité du philosophe Dans la création de la terreur, les sens jouent le premier rôle. Vision de l'entrée en cortège, l.11 et 23-24 ; sens de l'ouïe : la supérieure parle avec une voix forte et menaçante et à la question angoissée de Suzanne, la supérieure répond par le silence pour l'inquiéter davantage ; sens du toucher : «une fraîcheur subite qui me causa une convulsion légère A ces perceptions, le corps réagit par des manifestations physiques presque incontrôlables : sueur froide, jambes tremblantes, langage hésitant, voix faible qui va jusqu'à l'aphasie complète. [...]
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