Commentaire composé du chapitre 6 de La curée d'Emile Zola.
[...] Dans ce passage de La Curée, Zola se livre à une corrosive critique de la société du Second Empire. Ainsi, une impression de tumulte, de précipitation et de violence émaille le texte : le champ lexical de la violence, violemment creva s'enfonçant brutalement pillage irrigue l'épisode. De plus, cette atmosphère secouée est soulignée par la gradation croissante ce fut une poussée, un écrasement amorcée par un présentatif. Aussi, Zola fait appel à une langue originale et peu conventionnelle : il malmène la syntaxe, alourdit sa phrase à dessein en la rendant volontairement embarrassée on se ruait [ ] brutalement comme pour donner plus de poids à cette bande d'hommes comme il faut De plus, comme un musicien qui préfère les dissonances à l'harmonie, Zola recherche les écarts scripturaires, mêle les niveaux de langue : il utilise en effet des expressions familières comme creva bourré tout en conservant des règles syntaxiques rigoureuses, avec l'emploi du subjonctif tombât comme pour mieux souligner la discorde environnante et marquer son mépris. [...]
[...] D'autres, au contraire, buvaient, en courant inutilement après un morceau de pain. - Ecoutez, dit M. Hupel de la Noue, que les Mignon et Charrier, las de mythologie, avaient entraîné au buffet, nous n'aurons rien si nous ne faisons pas cause commune . C'est bien pis aux Tuileries, et j'y ai acquis quelque expérience . Chargez-vous du vin, je me charge de la viande. Le préfet guettait un gigot. Il allongea la main, au bon moment, dans une éclaircie d'épaules, et l'emporta tranquillement, après s'être bourré les poches de petits pains. [...]
[...] Outre la voix du narrateur, quelques fragments de discours directs –notamment les paroles du préfet, comme si Zola refusait de les assumer et de les prendre à son compte- animent cette page descriptive. De plus, Zola varie le point de vue de la narration. Narrateur omniscient, il rapporte les paroles du vieux monsieur au style indirect libre il n'y avait pas de bordeaux [ ] dormir Parfois, il prend du recul, se fait externe quand il décrit le souper de ces messieurs avec une composante réaliste ils causaient la bouche pleine [ ] sur le tapis abrupte, brutale et pourtant particulièrement visionnaire. [...]
[...] Par une sorte d'allégorie, Zola décrit dans cet épisode la ruée des bourgeois sur la ville de Paris après la chute de la République et l'avènement de Napoléon III. A travers cette scène, il joue sur la dualité du terme curée en donnant à voir l'appétit brutal de cette classe carnassière et sans scrupules, se ruant sur les viandes froides comme une meute de hyènes sur un animal mis à mort. L'extrait de la scène du banquet est marqué par sa vivacité descriptive, capable à la fois de rendre authentique et présent par le petit fait vrai et le grossissement qui va jusqu'à l'archétype de la bourgeoisie et peut susciter le sourire du lecteur. [...]
[...] Hupel de La Noue et les entrepreneurs exécutent leurs tâches. Ainsi, cette variété de rythme, accompagnée de verbes d'actions à l'imparfait et au passé simple, contribuent au signalé (=remarquable) dynamisme de la scène. Le tableau de la réception est divisé en bandes superposées : la première décrit la cohue qui frappe les invités, dont l'amassement s'étend dans toute une partie de la salle à manger, dans un plan qui s'étire de la porte de la salle à manger à la longue table comme la force d'une agglutination. [...]
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