Ce texte est un extrait du Contrat Social de Jean Jacques Rousseau. Publié en 1762, Du Contrat Social (ou Principes du Droit Politique) est un ouvrage de philosophie politique dans lequel Rousseau développe une réflexion sur quatre livres, et évoque diverses notions telles que l'esclavage, l'origine de la notion de société, de la notion même de peuple, la loi du plus fort ou encore le droit de la guerre, le tout dans l'optique de l'édification de la notion de pacte social, sujet qui est au cœur de cet ouvrage. Nous sommes ici dans le Chapitre VI intitulé "Du pacte social". Dans ce chapitre, Rousseau développe une réflexion en partant d'un questionnement, que nous allons aborder en tant que problématique. Il se pose une question particulière : quelle est l'organisation politique la plus sûre et la mieux pensée pour l'épanouissement des individus au sein de la société ?
Sa thèse est la suivante : le pacte social qu'il conçoit correspondrait le plus à cette organisation politique sûre et bien pensée qu'il recherche. En d'autres termes, le pacte social est le système politique le plus conforme à ses critères et garantirait l'épanouissement du peuple dans son intégralité. Nous apporterons une tentative de réponse au questionnement de Rousseau à travers un plan en trois parties.
[...] C'est un constat qu'il développe dans le chapitre VIII. En effet, le pacte d'aliénation nous apporte beaucoup plus que ce que l'on avait avant de s'y engager : "Quoi qu'il se prive dans cet état de plusieurs avantages qu'il tient de la nature, il en regagne de si grands, ses facultés s'exercent et se développent, ses idées s'étendent, ses sentiments s'ennoblissent, son âme toute entière s'élève [ . ] [il passe] d'un animal stupide et borné un être intelligent et un homme". [...]
[...] Cet investissement total, cette aliénation requise pour former le corps social, n'est cependant pas facile à obtenir et à mettre en place pour chacun. C'est là que l'on voit que le pacte social présente les traits d'une organisation politique très bien pensée, car c'est à travers un investissement individuel que l'on permet un développement à la fois individuel et collectif. À première vue, un investissement individuel n'aurait d'effet que sur la personne concernée, mais ici, étant donné que comme nous venons de le voir, chacun donne, et reçoit de l'autre beaucoup plus qu'il n'en avait auparavant, l'investissement individuel dépasse sa propre condition, et parvient à toucher le collectif, ou plus précisément un autre corps individuel, qui est le corps social formé par la somme des individus. [...]
[...] À première vue, le terme d'aliénation semble connoter quelque chose de négatif. En effet, lorsque l'on parle d'aliénation de manière générale, on a tendance à parler de la dépossession de l'individu et de sa perte de maîtrise de ses forces propres au profit de puissances supérieures. Milan Kundera, grand écrivain tchèque, dit même que l'aliénation consiste à être "l'allié de ses propres fossoyeurs". L'aliénation consisterait, en ce sens, en une perte irréversible des caractéristiques qui nous constituent en tant qu'individus. [...]
[...] Chaque personne qui donne reçoit des autres ce qu'elle a donné, ce qui permettrait une défense et une protection à la fois de chacun et du tout. L'union des forces permettrait donc une double défense et une double protection : celle de l'individu et celle du corps social. Rousseau évoque le fait que pour que la somme des forces puisse prendre forme, elle doit résulter d'un don total de chacun pour ne former au final qu'un seul corps. Chacun doit s'engager à se donner pour ne former qu'un. [...]
[...] Nous sommes alors dans un cas de figure ou deux forces contraires s'opposent : d'un côté, l'homme dans sa singularité, désireux de se conserver seul, et de l'autre un corps politique fondé sur une union qui stipule que la conservation de soi est possible à travers un investissement personnel vers l'autre. Rousseau constate que l'homme, confronté au corps politique, perd de sa singularité : "Cette somme de force ne peut naître que du concours de plusieurs : mais la force et la liberté de chaque homme étant les premiers instruments de sa conservation, comment les engagera-t-il sans se nuire, et sans négliger les soins qu'il se doit (lignes 5-7). [...]
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