Les Contemplations, A André Chénier - Victor Hugo (1856) - Un discours pédagogique sur l'inspiration poétique et l'effacement des contraintes strictes de la poésie formelle

Thèmes abordés

Les Contemplations, A André Chénier, Victor Hugo, discours pédagogique, inspiration poétique, contraintes de la poésie, formalisme littéraire, thème du bucolique, discours du bouvreuil, commentaire de texte

Résumé du document

Le poème "A André Chénier" est un poème situé au début des "Contemplations", il occupe la cinquième place du livre premier. Il est situé juste à la suite des premiers poèmes dédiés aux filles de Victor Hugo, ce qui témoigne de l'importance de cet hommage à André Chénier pour l'auteur. André Chénier est d'ailleurs mentionné dans un autre poème du recueil, intitulé "les malheureux" "J'ai vu Jean qui parlait au désert, Malesherbes, Egmont, André Chénier, rêveur des purs sommets ; Et mes yeux resteront éblouis à jamais Du sourire serein de ces têtes coupées." André Chénier figure donc parmi les inspirations engagées de Victor Hugo.

Extraits

[...] En conclusion, cette églogue se fond dans le reste des poèmes du livre premier de par la description du lien fort entre la nature et le poète qui est un fil conducteur de cette partie du recueil. Cependant il est unique, car il se veut particulièrement didactique. Il est également métapoétique et représentatif de l'avis de Victor Hugo sur l'art de l'écriture. Il allie parfaitement dans son style la simplicité et la virtuosité poétique, et dans son fond l'humour et la morale sage. [...]

[...] Victor Hugo se réapproprie ces symboles dans ce poème pour les nuancer et les libérer de leur sens conventionnel. Au centre de ce discours, le bouvreuil place aussi quelques vers moralisateurs sous forme d'une maxime (vers 17 et 18, « Ne crois pas que l'esprit du poète descend Lorsqu'entre deux grands vers un mot passe en dansant. »). Ces verres résument l'important du poème et sont placés parmi une avalanche d'exemples imagés de manière à être bien retenus par le poète, mais surtout en deuxième lecture par le lecteur. [...]

[...] L'univers bucolique est donc toujours bien présent dans ce poème tout comme dans les autres textes du livre premier. L'emploi du terme effrayant pour désigner le parc donne à cette nature un côté très paradoxal, entre paysage inspirant et féerique, et lieu sombre et obscur. De nombreuses oppositions dans le texte permettent de mettre en valeur ce contraste : « forets et eaux » qui oppose la terre et les forêts profondes a la clarté de l'eau, « parc sombre où jasaient des oiseaux » (ici le contraste est évident entre la première partie du vers qui fait penser à un lieu nocturne et silencieux, et la référence au chant des oiseaux qui rappellent plutôt le jour et qui donnent au parc un coté plus vivant.), « ou des pleurs souriaient ». [...]

[...] En effet, les chants véritables sont ceux que l'on trouve dans la nature, par exemple ceux des oiseaux, tandis que les chants des poètes n'en sont que des répliques. Cela expliquerait pourquoi il conseille par la suite au poète de « dégonfler » leurs vers c'est-à-dire de les alléger et de les débarrasser de leurs artifices, pour qu'ils soient plus proches de la nature et plus authentiques. Dans les vers 14 à 16 et 19 à 20 le bouvreuil se met à lister plusieurs métaphores satiriques entre la nature et la poésie pour expliquer que les poètes devraient s'inspirer de la nature et laisser paraître dans leur art les contrastes entre comique et tragique. [...]

[...] Le verbe mésallier fait d'ailleurs référence à cette mauvaise réputation puisqu'il renvoie aux mariages faits avec un partenaire de rang inférieur, ce qui était très mal vu par la société. La prose est associée au langage populaire, vulgaire et est donc opposée au langage artistique. On pourrait donc penser que l'usage du familier dans un vers poétique lui ferait perdre de la valeur de la même manière qu'un mauvais mariage peut faire perdre son rang social. Mais Hugo choisit de débuter ce poème par une affirmation surprenante qui indique le contraire, pour attiser la curiosité des lecteurs, avant de leur expliquer son point de vue plus en détail dans la suite du poème au travers du discours du bouvreuil. [...]