Hannah Arendt, La condition de l'homme moderne, littérature, oeuvre, personnage, mise en scène, artifice humain, émotions, sentiments, cognition, vie humaine, oeuvres d'art, poésie
Dans la section « la permanence du monde et l'oeuvre d'art » Arendt rappelle tout d'abord la singularité de l'oeuvre d'art. Cette dernière se caractérise par son originalité et par sa mise à l'écart délibéré des autres objets d'usages ordinaires. Dans le temps, l'oeuvre d'art ne devrait subir aucune altération, car elle n'est pas destinée à être utilisée et ne répond à aucun besoin nécessaire à la survie de l'homme. Ensuite, pour l'autrice, la faculté propre à l'homme de penser est à l'origine de l'oeuvre d'art. À travers cette dernière, l'homme libère ses sentiments en les transformant en objets. Ce processus, que l'autrice nomme réification, permet de faire entrer dans l'artifice humain d'autre attribut tel que les désirs ou les besoins.
[...] La distance entre la pensée et le poème tend à disparaître. Cependant il semblerait que certaines émotion, souffrances ne puissent être exprimées par l'intermédiaire des œuvres d'art. En 1949, le philosophe allemand Theodor W. Adorno a écrit une phrase qui fit polémique : « Écrire un poème après Auschwitz est barbare, et ce fait affecte même la connaissance qui explique pourquoi il est devenu impossible d'écrire aujourd'hui des poèmes. » dans Critique de la culture et société. Cette question de l'irreprésentable, Arendt ne l'aborde pas dans ce texte. [...]
[...] La durabilité de la poésie s'explique par une caractéristique que l'on retrouve dans l'ensemble des œuvres d'art, son absence d'utilité. Cette « absence d'utilité » doit s'entendre comme une « absence d'usage ». La poésie ne participe pas à la survie du corps, toutefois, dans certaines circonstances extrêmes, elle peut y contribuer. Dans le chapitre Le Chant d'Ulysse, dans Si c'est un homme, Primo Levy, alors prisonnier dans un camp d'extermination, rapporte que lors d'une corvée il lui vient à l'idée de réciter des passages de La divine comédie de Dante et que, dit-il : « L'espace d'un instant, j'ai oublié qui je suis et où je suis ». [...]
[...] Dans cet extrait issu du chapitre IV de la Condition de l'homme moderne, ouvrage paru en 1958, Arendt traite du statut de l'œuvre d'art en général et de la poésie en particulier dans ses rapports à la pensée et à la permanence du monde. Poésie vient du grec « poien » qui signifie créer, fabriquer. Le poète est donc celui qui crée à partir des mots, celui qui va donner forme au langage. Ainsi, la poésie est, avec la musique, l'art le moins matérialiste et pourtant la mémoire et le souvenir semblent être une condition suffisante à sa sauvegarde. [...]
[...] » Pour la poésie, la phrase d'Arendt que l'on retrouve dans ce même chapitre IV « La pensée vivante se matérialise en lettre morte et on ne peut sauver cette pensée vivante que si la lettre morte rencontre une vie qui veut la ressuscite » prend tout son sens. On passe du poème qui existe « comme parole vivante dans le souvenir du barde et de son auditoire » (l. 22) à une « lettre morte », le texte manuscrit. [...]
[...] La condition de l'homme moderne - Chapitre IV, "la permanence du monde et l'œuvre d'art" - Hannah Arendt (1958) Résumé de la section : Dans la section « la permanence du monde et l'œuvre d'art » Arendt rappelle tout d'abord la singularité de l'œuvre d'art. Cette dernière se caractérise par son originalité et par sa mise à l'écart délibéré des autres objets d'usages ordinaires. Dans le temps, l'œuvre d'art ne devrait subir aucune altération, car elle n'est pas destinée à être utilisée et ne répond à aucun besoin nécessaire à la survie de l'homme. [...]
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