La scène 3 de l'acte III apparaît comme un tournant de l'intrique dans Tartuffe. Le personnage éponyme dévot imposteur a réussi à convaincre les piliers de la famille c'est-à-dire Orgon et sa mère madame Pernelle de sa bonne foi. Tartuffe apparaît seulement une scène plus tôt (Acte III, scène 2) et montre déjà le paradoxe du dévot sensible à la tentation de la chaire. Dorine doit « [couvrir] ce sein [qu'il ne saurait] voir » alors qu'elle annonce l'entretien à venir avec Elmire, sa maîtresse.
L'entrée du personnage de Tartuffe sur scène est attendue depuis le début de la pièce : on voit dans les premiers actes les répercussions de sa manipulation sans l'avoir jamais entendu parler. Son art de la rhétorique reste donc à observer en application. La rencontre d'Elvire lui donne cette opportunité. Il tente immédiatement de la séduire alors que celle-ci est l'épouse d'Orgon. Conscient du risque encouru, Tartuffe continu son entreprise qui culmine dans la tirade de l'extrait : il met en avant sa condition d'homme et joue sur son statut de dévot. De nombreux procédés sont utilisés à cette fin et crée un discours argumentatif gradué en vue de faire accepter à Elmire de le prendre pour amant. Ainsi c'est le genre délibératif qui est aux fondements du discours, visant à faire prendre ou non la décision à Elmire. Pourtant, l'éloge et le plaidoyer viennent se mêler à l'argumentation afin d'assurer la réussite à Tartuffe.
Comment ce discours développe-t-il plusieurs genres oratoires face à la nécessité de convaincre l'orateur ? Quelles sont les limites d'une telle pluralité d'outils rhétoriques sur l'ensemble de la tirade ?
[...] Malgré le style moyen, la langue est primordiale pour Tartuffe. Cette importance des mots et de leur résultat d'ensemble est soulignée par l'emploi des mots discours au vers 4 et de l'action locutoire au vers 15 j'emploie ici la voix Tartuffe montre combien la mise en forme est essentielle : il choisit ses mots et peut-être considéré comme un orateur. Provoque une surabondance et une insistance pesante En effet cela ne signifie pas qu'il est un orateur efficace. La répétition des procédés et leur diversité (Chiasme, occurrences, tournures phrastiques, métaphores, énumérations ) peuvent ridiculiser le propos et discréditer le discours dans son ensemble.(cf. [...]
[...] S'insert entre ces deux phrases les vers 14 et 15 illustrant le pathos (cf. intra). Enfin la troisième partie : la visée perlocutoire du genre délibératif Par le contre-exemple (cf. intra Tartuffe va venir valoriser le bonheur de son amour face au malheur qu'apporterait à Elmire un galant de cour. Pour cela il oppose le réseau lexical du nuisible disgrâce ; «vains ; «targuer ; «déshonore à celui de l'utile et du bonheur («sûr discret aimée acceptant notre cœur amour plaisir La césure entre le bonheur et le malheur se fait par le mais qui introduit la seule alternative au bonheur. [...]
[...] La réplique qui suit cette tirade montre que la rhétorique est bien connue, mais peu efficace, car la rhétorique en termes assez forts à [l'âme d'Elmire] s'explique comme elle le dit, mais la réalité et l'honnêteté ne la font pas adhérer au discours. Alors peut-on voir que les véritables orateurs ne sont pas ceux que l'on croit. En effet, à la fin de cette tirade, Elmire retourne la situation en sa faveur ; elle réussit finalement à faire tomber le masque de Tartuffe en usant avec parcimonie de rhétorique. Les limites de cette tirade ne se trouvent pas dans la théorie, mais dans la pratique qui devient presque ridicule tant elle est poussée. [...]
[...] S'en suit une justification introduite par la conjonction restrictive mais qui s'emploie à rendre raison des pêchés de l'homme religieux. Puis il détourne la conjonction si utilisé habituellement pour l'éventualité avec l'imparfait, pour en faire une analogie cause conséquence avec le présent de l'indicatif vous devez pour retourner la situation contre Elmire. Elle devient la cause et prend tous les torts de cette corruption du dévot à travers la synecdoque vos charmants attraits En alternant les conjonctions et le présent d'énonciation, Tartuffe effectue un premier plaidoyer en sa faveur dont l'accusé est la beauté d'Elmire. [...]
[...] Tout au long de ce discours, Tartuffe semble à la fois vouloir montrer au début de son discours que sa condition d'homme prime sur sa fonction de dévot.(cf. intra Ainsi, les pulsions et affects dominent son discours pour le placer en victime humaine et justifier sa faiblesse. Néanmoins, il veut continuer à renvoyer un ethos favorable : il va donc conserver la morale renvoyée par le dévot. C'est ce que l'on observe lors de l'antithèse finale où il reste un membre des gens comme nous c'est-à- dire les hommes de foi. Ils véhiculent une image positive du juste, du bon, et des bonnes mœurs. [...]
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