En 1913, Louis Hémon, un français ayant vécu au Québec, publie le roman Maria Chapdelaine. Ce roman très documenté dépeint la vie des « habitants » francophones et de leur environnement au public français, pour qui ce pays et ses moeurs restent méconnus.
Tout d'abord décrié, le roman sera plus tard considéré comme fondateur de la littérature québécoise, affichant bon nombre de lieux communs révélateurs de toute une culture.
Cet extrait particulièrement, situé à la quasi fin de l'oeuvre, juste avant le dénouement, souligne le côté identitaire du roman.
On retrouve Maria et son père auprès de madame Chapdelaine récemment décédée, juste après la confession de M. Chapdelaine quant à la vie rude passée avec sa femme.
Au fil de cet extrait, les personnages vont se révéler à eux-mêmes et aux lecteurs, jusqu'à prendre une dimension universelle.
[...] Une nouvelle fois, c'est à travers la mort que se révèle le caractère « universel » des personnages. Dans cette énumération à la fois des difficultés de vie et des qualités des femmes ; l'aspect familier et familial de la mère de Maria chemine dans sa pensée pour devenir une réflexion générale sur la condition des femmes de pionniers ; un éloge de la femme d'un habitant des bois.
Cette sorte d'admiration respectueuse de sa mère et plus généralement des femmes « d'habitants » va pousser Maria à se questionner elle-même.
[...] Le travail de la terre n'apparaît à travers le bilan de cette « première voix » non plus comme pénible mais comme une véritable bénédiction. On trouve de nouveau ce vocabulaire religieux dans le descriptif des travaux agricoles : le bétail est « délivré » du mal qu'était l'hiver, on parle « d'alchimie généreuse de la terre » et de « forces géantes ». La terre en été apparaît sous un caractère divin, fruit justement de cette « alchimie » entre les conditions climatiques et le travail des « habitants ». (...)
[...] S'ensuit p une réflexion de Maria sur le mérite de sa mère, et plus globalement de toutes ces femmes : Vivre toute sa vie en des lieux désolés peiner de l'aube à la nuit, dépensant toutes les forces de son corps en mille dure besognes ne jamais avoir autour de soi que la nature primitive, sauvage et garder au milieu de tout cela l'ordre raisonnable et la douceur, et la gaieté, qui sont les fruits de bien des siècles de vie sans rudesse, c'était une chose difficile et méritoire, assurément. Une nouvelle fois, c'est à travers la mort que se révèle le caractère universel des personnages. Dans cette énumération à la fois des difficultés de vie et des qualités des femmes ; l'aspect familier et familial de la mère de Maria chemine dans sa pensée pour devenir une réflexion générale sur la condition des femmes de pionniers ; un éloge de la femme d'un habitant des bois. [...]
[...] Pour annoncer l'automne, le terme la moisson le précède, comme pour rappeler que le travail de la terre est indissociable du rythme saisonnier, sur lequel il est calqué. LE TRAVAIL -Le travail de la terre n'apparaît à travers le bilan de cette première voix non plus comme pénible mais comme une véritable bénédiction. On trouve de nouveau ce vocabulaire religieux dans le descriptif des travaux agricoles : le bétail est délivré du mal qu'était l'hiver, on parle d'alchimie généreuse de la terre et de forces géantes La terre en été apparaît sous un caractère divin, fruit justement de cette alchimie entre les conditions climatiques et le travail des habitants Tous ces paramètres de l'été chaleur du soleil, pluie chaude travaillaient en esclaves soumises p.183 ; cette idée de la terre oeuvrant pour l'habitant répond en opposition au monologue de Lorenzo Surprenant p.130 qui cite Vous êtes les serviteurs de vos animaux parce que la terre est avare et l'été trop court. [...]
[...] C'est alors que les voix de Québec se font entendre. A travers la mort de ses parents, physique pour la mère, symbolique pour le père ; Maria, comme le lecteur, réalise que le côté singulier des personnages s'efface pour devenir des symboles forts, ceux des pionniers du Canada français. Même chose pour François, seul homme réellement aimé de Maria, qui devient l'image de tous les coureurs des bois disparus : les hommes qui s'étaient écartés mouraient sans secours> . > p.181, ou encore d'ou les garçons téméraires ne reviennent pas. [...]
[...] Le printemps apparaît comme une transition jusqu'à l'apogée que représente l'été et l'éblouissement des midis ensoleillés p.183. On notera également l'importance de la chute d'eau écume blanche sur l'eau noire, dont la seule vue répandait une fraîcheur délicieuse »p.183. Ici la chute s'oppose dans les mêmes couleurs au blanc de la neige et la noirceur du ciel par grands froids, et l'on y cherche la fraîcheur au lieu de la fuir. L'été représente la victoire absolue sur l'hiver, un cadeau mérité pour avoir traversé la période de froid. [...]
[...] Il s'agira donc de voir en quoi cet extrait emmène le cas particulier de la famille Chapdelaine à quelque chose de général sur le mode de vie au Québec et sur l'affirmation de son identité. Des personnages transcendés -Dans cet extrait, la narration emmène le lecteur à prendre du recul vis à vis des personnages en leur conférant un caractère non plus relatif au seul cas des Chapdelaine, mais commun à tous les habitants du Québec LE PERE -Tout au long du roman, M Chapdelaine reste sobre, distant, de ses sentiments ; mais après le décès de sa femme et le bilan de sa vie passée, il semble ruminer longuement son regret et son chagrin p.179. [...]
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