Tout l'art du recueil des Fables publié entre 1668 et 1678 par Jean de La Fontaine, fabuliste français, réside dans le pouvoir de la parole qu'il accorde aux animaux. Inspiré fortement par des sources antiques, il a su à travers son oeuvre, conserver cette tradition. Le fabuliste s'applique au mieux à décrire sa société, celle du XVIIe siècle. Pour ce faire, il utilise un bestiaire hautement symbolique, tous représentatif d'une qualité ou d'un défaut humain et les met ainsi en scène. La structure générale des Fables repose sur le même schéma. À chaque fable, correspond une accroche, une intrigue, un élément déclencheur et une morale (placée soit au début, soit à la fin). Cette morale est là pour donner une leçon de vie. La mise en scène du fabuliste peut être adaptée à la vie réelle ce qui donne une vivacité au récit et lui attribue une vérité plus percutante.
La fable que nous allons étudier s'intitule « L'hirondelle et les petits oiseaux ». Il s'agit de la huitième fable du Livre un situé dans le premier recueil des Fables. Cette fable qui a été inspirée par une version anonyme est présente dans la Mythologia aesopica de Névelet. Elle reprend le thème de la prévoyance déjà illustrée dans la « Cigale et la fourmi » (I,1). Une hirondelle forgée par ses différentes expériences, conseille à des Oiseaux de manger des graines qui produiront les outils, qui les conduiront à leur perte, mais insouciants les oiseaux décident de nier cette recommandation. Comment par ses multifacettes, l'hirondelle donne-t-elle des conseils de vie, emprunts de sagesse, qui constituent la morale ?
[...] L'hirondelle est mise en scène par le fabuliste, elle peut être considérée comme un prophète, un moraliste et un nouvel Ulysse.Commençons par la figure du prophète. Le choix du fabuliste pour l'hirondelle n'est pas anodin. En effet, cet oiseau avertit le danger, elle est prévoyante : Voyez-vous cette main qui, par les airs chemine ? Un jour viendra, qui n'est pas loi, que ce qu'elle répand sera votre ruine. Un prophète c'est une personne qui tient, d'une inspiration divine, la connaissance d'événements à venir et qui les annonce par ses paroles ou ses écrits. [...]
[...] Dans la fable le Bûcheron et Mercure La Fontaine définit ses fables comme une ample comédie à cent actes divers ».Toutes les fables ne s'apparentent pas au théâtre, mais la plupart d'entre elles s'organisent effectivement comme des pièces de théâtre. Elles en possèdent la structure; elles visent à créer l'illusion du vrai ce que nous pouvons constater ici. L'action des fables est par ailleurs soumise aux mêmes impératifs que l'action d'une pièce. Elle est progressive. On peut la découper en actes Etudions cette progression dans cette fable. [...]
[...] En choisissant ces temps, La fontaine a voulu montrer que le savoir et la sagesse sont deux qualités qui ne sont jamais acquises. Il faut tout le temps réinitialiser ces valeurs en voyageant comme peut le l'hirondelle par exemple. Les vers suivants pourraient être à rapprocher d'un épisode célèbre de l'Odyssée: le chant des sirènes. Prévoyant, Ulysse se fait attacher au mât d'un bateau pour pouvoir écouter le chant des sirènes sans danger. Présentée différemment dans cette fable, la prévoyance est aussi de maître: Celle-ci prévoyait jusqu'aux moindres orages, et devant qu'ils ne fussent éclos, les annonçait aux matelots v4 à 6). [...]
[...] La morale est courte : seulement deux vers ce qui nous montre que le fabuliste consacre plus d'importance au récit qu' à la morale : Nous n'écoutons d'instincts . 57-58). Nous pourrions alors parler d'hypertrophie de la narration puisque comme nous l'avons constaté, le fabuliste a privilégié le récit plutôt que la morale. L'originalité de la fable est aussi rendue compte à travers le choix des personnages. L'hirondelle est un oiseau prévoyant les dangers. Elle est caractérisée ici principalement par sa sagesse et sa prévoyance. Elle connaît tous les risques et les pièges des hommes engins ( v 15) et mainte et mainte machine (v17). [...]
[...] Finalement,l'hirondelle a le même but que La Fontaine : instruire les autres. Elle insiste sur le devoir des oisillons par ses impératifs demeurez au logis ou changez de climat: Imitez le canard, la grue ou la bécasse v44-45). Tout comme un moraliste elle fait la morale: Mais vous n'êtes pas en état de passer, comme nous, les déserts et les ondes, ni d'aller chercher d'autres mondes . (v46 à 49). On apprend que les oiseaux sont confus se mirent à jaser confusément Cette expérience semble finalement leur avoir servi de leçon. [...]
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