Le Malade imaginaire est une comédie-ballet trois actes (1673). Il s'agit de la dernière pièce de Molière, où il joua le rôle d'Argan. Peu après la fin de la quatrième représentation, Molière mourut chez lui, d'épuisement et de phtisie. Ironiquement, c'est un vrai malade qui incarnait le faux malade… Le Malade imaginaire est centré autour du personnage d'Argan, personnage hypocondriaque et délirant qui a décidé de marier sa fille Angélique à un grand dadais niaiseux, Thomas Diafoirus, médecin frais émoulu des écoles et neveu de médecin lui-même, dans le but avoué de conjurer par cette alliance sa maladie inexistante. Béralde, le frère d'Argan, est opposé à ce mariage contre-nature ; il voudrait qu'Angélique (la fille d'Argan) épouse Cléante, le jeune homme qu'elle aime.
Dans cet extrait de la scène 3 de l'acte III, Béralde cherche à ôter à son frère ses illusions sur la médecine et les médecins. Au-delà de l'enjeu dramatique évident (il s'agit pour Béralde de convaincre son frère que les médecins ne peuvent rien pour lui, et que donc il n'a pas besoin de marier sa fille à Thomas Diafoirus), le passage revêt une importante dimension philosophique : à partir de l'exemple de la médecine, c'est le charlatanisme de toutes les fausses sciences et la crédulité humaine que Molière dissèque et dénonce.
Nous étudierons d'abord les deux principales dimensions, dramaturgique et pédagogique, de ce dialogue, puis nous examinerons les différentes facettes de la foi aveugle d'Argan à l'égard de sa religion, la médecine, enfin nous nous intéresserons à l'usage malhonnête que la médecine fait du langage, tel que Béralde l'analyse ici avec finesse.
[...] Commentaire : La fausse science des médecins - Molière, Le malade imaginaire, acte III, scène 3 Plan du commentaire composé Introduction 1.Les dimensions dramaturgique et pédagogique a.L'opposition de deux personnalités b.Un dialogue qui aboutit à une impasse c. Sauf pour le spectateur édifié 2. La crédulité de la dupe a. Espérances et illusions b. La peur de la mort c. Le sophisme de l'autorité 3. L'imposture médicale a. La médecine comme religion b. [...]
[...] TOINETTE: C'est fort bien fait. ARGAN: Mon Dieu! MONSIEUR PURGON: Et je veux qu'avant qu'il soit quatre jours, vous deveniez dans un état incurable. ARGAN: Ah, miséricorde! MONSIEUR PURGON: Que vous tombiez dans la bradypepsie, ARGAN: Monsieur Purgon. MONSIEUR PURGON: De la bradypepsie dans la dyspepsie, ARGAN: Monsieur Purgon. MONSIEUR PURGON: De la dyspepsie dans l'apepsie, ARGAN: Monsieur Purgon. MONSIEUR PURGON: De l'apepsie dans la lienterie, ARGAN: Monsieur Purgon. [...]
[...] La manière dont Argan répond à Béralde confirme la dimension religieuse de son attachement : ARGAN Quoi! vous ne tenez pas véritable une chose établie par tout le monde et que tous les siècles ont révérée ? Le verbe révérer qui est ici mis en valeur par sa place finale dans la phrase, signifie étymologiquement craindre avec respect Au dix- septième siècle il s'appliquait aux choses saintes, de caractère sacré. La médecine apparaît donc comme une fausse religion, à laquelle des croyants tels qu'Argan rendent un culte aveugle. [...]
[...] 1.Les dimensions dramaturgique et pédagogique a.L'opposition de deux personnalités Quoique assez statique, le passage qui nous intéresse présente un intérêt dramaturgique certain. En effet, dans ce passage, nous assistons au face à face de deux personnalités opposées. Béralde est l'homme raisonnable ; de son propre aveu, il regarde les choses en philosophe Il évoque la nature la faiblesse humaine : des concepts généraux qui appartiennent effectivement au langage de la philosophie. Argan apparaît quant à lui comme un homme impulsif, dominé par ses émotions beaucoup plus que par sa raison. [...]
[...] Comme l'a fort bien dit Montaigne - qui comme Molière ne faisait pas confiance aux médecins, et qui comme lui aussi est mort de maladie - : qui a appris à mourir, il a désappris à servir. Inversement, qui craint la mort se retrouve très vite esclave de mille craintes plus ou moins rationnelles, et de tous ceux qui savent jouer habilement de ces angoisses, en faisant miroiter tour à tour une promesse de vie ou une menace de décès. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture