Cet extrait du roman Les Confessions de Dan Yack de Blaise Cendrars, publié en 1929, constitue le monologue de Dan Yack s'adressant à une dactylographe à qui il confie le soin de retranscrire les lectures qu'il a lui-même réalisées d'un cahier de sa femme qu'il vient de perdre.
[...] C'est peut-être la raison pour laquelle la digression guette toujours dans cet extrait, sans triompher de la première parole, mais sans toutefois disparaître tout à fait. [...]
[...] L'expression d'un sens semble ainsi ne pouvoir surgir que de la reprise, de la correction et de la rature qu'elles soient écrites ou orales , de sorte que l'extrait tout entier présente une esthétique de la rupture. III. Une écriture disruptive Le bavardage: l'essentiel côtoie le bavardage Le caractère disruptif de l'extrait se manifeste ici au travers d'une écriture saccadée et faisant retour sur elle-même. A cet égard, il n'est pas anodin de noter que « bégayer » signifie du point de vue de l'étymologie « bavarder ». Or c'est bien sur le mode du bavardage désinvolte que Dan Yack aborde en creux la question de l'absence de sa femme. [...]
[...] Il convient toutefois de noter que l'emploi de ce verbe constitue une équivoque intéressante : d'une part, « brouillé » peut faire référence à un signal sonore de piètre qualité ; d'autre part, « brouiller » possède la même origine étymologique que « brouillon ». En réalité, c'est l'objet même des consignes qui est ici questionnable compte tenu du fait que la dactylographe dispose du cahier de Mireille. Autrement dit, le détour par l'oralité semble compliquer l'exercice davantage qu'il n'aide à la réalisation du projet. Et précisément, les consignes données par Dan Yack consistent une invitation à la suppression des ajouts de cette voix, exprimée sur le mode du négatif : « ne tapez pas, sans tenir compte, ni mes interventions, ni . ». [...]
[...] Ainsi, le milieu du texte offre une forme d'actualisation du titre du roman avec des confessions faites par Dan Yack (« je dois vous avouer »), mais l'objet véritable de la conversation ne paraît qu'à la fin de l'extrait lorsqu'il délivre ses recommandations à la dactylographe. Pourtant, ces consignes demeurent particulièrement vagues et sont exprimées au moyen d'un recours récurrent à l'hyperbole. Ainsi, « l'appareil enregistre tout » s'oppose à « je n'y comprends rien » et cette polarisation hyperbolique contribue à définir l'exercice de l'écriture comme un tri entre la totalité du réel et son inintelligibilité le mot est d'ailleurs dans le texte sous la forme adjectivale. [...]
[...] Un monologue de paroles enchâssées Une parole marquée par la polyphonie Si le texte constitue du point de vue formel le monologue de Dan Yack, il n'en donne pas moins à entendre plusieurs paroles distinctes. Cette polyphonie se compose en strates de la parole de Dan Yack, qui s'exprime en son nom propre, ainsi que de la parole du gramophone, auxquelles s'ajoute la parole de Mireille qui, bien qu'absente du texte stricto sensu, est figurée par les « rouleaux de cire » et le « petite cahier » et constitue l'objet de la discussion entre Dan Yack et la dactylographe. [...]
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