La fin du XIXème Siècle est marquée par un basculement constant entre l'enthousiasme positiviste et une peur métaphysique. Les camps ne sont pas aussi tranchés que la critique moderne semble le penser. Ernest Renan qui voulait dans l'Avenir de la Science « organiser scientifiquement l'humanité » reconnait quelques années avant sa mort avoir parlé sous le coup d'une « forte encéphalite » dans la Préface de ses Pensées.
[...] Lord Ewald accepte de se consacrer à l'illusion et de se détourner du réel, l'Art est devenu un absolu et un refuge. Gwenhael Ponnau voit même dans Hadaly un personnage christique, dans une perspective de rédemption de l'Idéal par la Science. Elle développe cette vision dans L'Eve future ou l'œuvre en question mais elle parait trop soucieuse de tout renvoyer au pacte faustien et néglige la théorisation symboliste. Le chapitre douze consacre certes la victoire écrasante de la science humaine illimitée qui ouvre vers l'Impossible. [...]
[...] Villiers de l'Isle-Adam veut ainsi insister sur la part mystérieuse de la nouvelle femme, qui semble capable d'envisager le futur, de ménager les susceptibilités et d'éprouver de réels sentiments. Pour le narrateur, Hadaly est devenue capable de tout maîtriser, lorsqu'elle entre dans le sarcophage. Elle fait des choix personnels elle est le sujet des verbes d'action. Les deux protagonistes semblent pétrifiés dans un renversement de valeur face à la vision érotisée que propose le romancier. Il insiste en effet sur l'aspect physique et sur le côté précieux de la jeune femme, ce qui crée un nouveau contraste avec la disparition de la comédienne dans le récit précédent. [...]
[...] Il joue sur le titre Penseroso et sur l'exergue, afin de suggérer une fusion temporelle et artistique, mêlant par l'intertextualité la poésie, le chant, la musique et la peinture. Le récit se démarque des autres chapitres par les nombreux éléments descriptifs qui renvoient à l'imaginaire gothique. Le cercueil d'Hadaly est l'élément encadrant. Villiers joue sur les adjectifs objectifs et axiologiques afin de créer un effet d'admiration. La couleur dominante est le noir, marqué par les références aux matières, végétales, par l'ébène, et le satin, minérales par l'étain. [...]
[...] De même la référence à Milton permet de dresser un tableau grotesque, cadre d'une initiation fantastique. Villiers de l'Isle-Adam se souvient sans doute de l'arrivée de Poussin dans l'Atelier de Frenhoffer chez Balzac dans Le Chef- d'œuvre inconnu. Les deux romanciers jouent sur le fantastique pour deux moments forts dans l'initiation des personnages. Les touches descriptives et l'intertextualité contribuent à créer cette ambiance fantastique. Ce chapitre marque nettement la victoire de l'Eve Future et la réussite de l'ambitieux projet d'Edison. [...]
[...] Les choix narratifs également relèvent de l'intrusion du fantastique dans ce récit. Le point de vue se veut force attractive pour faire rentrer le lecteur dans ce décor étrange : L'emploi de l'expression « notre ère » établit cette complicité, renforcée par le positionnement descriptif « à droite, à gauche ». Le narrateur semble lui-même accepter l'irrationnel par des métaphores et approximations comme « machine à tonnerre ». Il est réduit au simple rôle de témoin dans une narration externe qui lui donne une certaine consistance. [...]
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