Commentaire détaillé du début de l'acte I de En attendant Godot de Samuel Beckett, jusqu'à "Estragon agite son pied, en faisant jouer les orteils, afin que l'air y circule mieux."
[...] Cette répétition de gestes qui ne débouchent sur rien fait de ces personnages des clowns. Un comique de situation : des quiproquos comiques et un couple toujours en bisbille, où chacun adresse à l'autre des reproches au sujet des choses les plus banales de la vie quotidienne Tu attends toujours le dernier moment. La chaussure qu'il n'a pas enlevée depuis longtemps. Un comique de langage : à travers le vide qui occupe leur discours, les décrochages des niveaux de langue, certaines annotations qui sont comiques à la lecture mais pas forcément à la mise en scène Estragon, au prix d'un suprême effort, parvient à enlever sa chaussure Jeu avec les niveaux de langue : saloperie / on portait beau Voilà l'homme tout entier Mal il me demande si j'ai mal : adresse implicite au spectateur comme on en trouve fréquemment au cirque ou dans un spectacle de marionnettes. [...]
[...] Tu as mal ? ESTRAGON. Mal ! Il me demande si j'ai mal ! VLADIMIR (avec emportement). Il n'y a jamais que toi qui souffres ! Moi je ne compte pas. Je voudrais pourtant te voir à ma place. Tu m'en dirais des nouvelles. ESTRAGON. Tu as eu mal ? VLADIMIR. Mal ! Il me demande si j'ai eu mal ! ESTRAGON (pointant l'index). Ce n'est pas une raison pour ne pas te boutonner. [...]
[...] Tu crois ? VLADIMIR. Je suis content de te revoir. Je te croyais parti pour toujours. ESTRAGON. Moi aussi. VLADIMIR. Que faire pour fêter cette réunion ? (Il réfléchit) Lève-toi que je t'embrasse. (Il tend la main à Estragon.) ESTRAGON (avec irritation). Tout à l'heure, tout à l'heure. Silence. VLADIMIR (froissé, froidement). Peut-on savoir où monsieur a passé la nuit ? ESTRAGON. Dans un fossé. [...]
[...] depuis le temps . je me demande . ce que tu serais devenu . sans moi . (Avec décision) Tu ne serais plus qu'un petit tas d'ossements à l'heure qu'il est, pas d'erreur. ESTRAGON (piqué au vif). Et après ? VLADIMIR (accablé). C'est trop pour un seul homme. (Un temps. Avec vivacité.) D'un autre côté, à quoi bon se décourager à présent, voilà ce que je me dis. Il fallait y penser il y a une éternité, vers 1900. ESTRAGON. Assez. [...]
[...] sans moi car un personnage n'existe qu'en tant qu'il est perçu par un autre). On notera également le jeu sur une référence à vide C'est long, mais ce sera bon. Qui disait ça ? qui ne renvoie à rien de précis, mais qui dénote simplement l'appartenance de l'écriture de Beckett à un corpus universel. Ce théâtre n'est pas dégagé du monde. Cette importance des didascalies révèle donc le caractère très écrit de cette pièce, la maîtrise absolue du dramaturge. CONCLUSION : Cette scène d'exposition n'expose ainsi rien, sinon un état proche de la fin ; elle esquisse l'attente qui va devenir le fil directeur, et peut-être même le seul fil de la pièce. [...]
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