« Colloque sentimental » est le dernier des poèmes du recueil Fêtes galantes. Cette situation dans le recueil fait sens, car il fonctionne comme une clausule, une conclusion sans appel. En effet, si Steve Murphy se demande avec raison en quoi « Colloque sentimental » est une fête galante, c'est parce que la tonalité et la thématique de ce poème ont perdu toute coloration festive. Les fantaisies galantes de l'arlequin « si fantasque au costume fou » de « Colombine », de l'abbé divagant de « Sur l'herbe » ou du Pierrot gourmand de « Pantomime » ont définitivement disparu laissant vide « le vieux parc solitaire et glacé » mystérieusement hanté par deux spectres mystérieux qui portent en eux tout le passé des fêtes galantes déclinées précédemment dans le recueil.
C'est un couple étrange qui se retrouve dans une ambiance hiémale prolongeant presque logiquement et comme un ultime assourdissement le poème précédant « En sourdine » qui marquait déjà la paisible entrée du recueil dans l'indicible et l'impassibilité. « Colloque sentimental » crée également un diptyque avec le poème liminaire « Clair de lune » dans un effet de cadrage en miroir. Dans « Clair de lune », l'âme de la femme aimée est comparée à un « paysage » où « masques et bergamasques » chantent « l'amour vainqueur ». « Colloque sentimental » est également un nocturne (probablement sans clair de lune) mais c'est le paysage qui contient des « âmes », au sens spectral du terme, et « l'amour vainqueur » semble céder la place à « l'espoir vaincu » avec de nombreux effets de symétrie sensibles à la lecture du poème
[...] L'avoine est en effet présente chez le poète sous forme de steriles avenae en latin, ce qui pourrait renvoyer à la stérilité des amours homosexuelles. Les deux spectres pourraient être deux hommes, même si le voile de l'indécision reste entier. Enfin, le sens argotique de volée de coup (aujourd'hui, en argot, on dit encore avoiner quelqu'un) peut être un ultime rappel du colloque en tant que soufflet sentimental. L'acmé de l'indécision porte sur le dernier vers bien mystérieux qui rend complexe la situation d'énonciation. [...]
[...] 'Colloque sentimental' de Verlaine, un poème de l'indécision ? Introduction Colloque sentimental est le dernier des poèmes du recueil Fêtes galantes. Cette situation dans le recueil fait sens, car il fonctionne comme une clausule, une conclusion sans appel. En effet, si Steve Murphy se demande avec raison en quoi Colloque sentimental est une fête galante[1], c'est parce que la tonalité et la thématique de ce poème ont perdu toute coloration festive. Les fantaisies galantes de l'arlequin si fantasque au costume fou de Colombine de l'abbé divagant de Sur l'herbe ou du Pierrot gourmant de Pantomime ont définitivement disparu laissant vide le vieux parc solitaire et glacé mystérieusement hanté par deux spectres mystérieux qui portent en eux tout le passé des fêtes galantes déclinées précédemment dans le recueil. [...]
[...] Ce qui passe (les deux formes) est glacé et elles évoquent un passé glacé. II. Un dialogue mystérieux (v.7-14) Le dialogue entre les deux spectres fait irruption dans le poème avec le passage au présent d'énonciation et la présence de tirets qui viennent découper le rythme jusqu'ici languissant des décasyllabes. L'usage du dialogue qui permet de donner voix aux deux spectres rappelle le poème Les Indolents dans les Fêtes galantes où s'installe un dialogue entre Tircis et Dorimène : - Le rare est le bon. [...]
[...] L'ambiguïté strophique se double d'une ambiguïté rimique, car le dialogue scinde en deux ce qui pourrait être assimilé à deux quatrains aux rimes hors-norme puisqu'elles sont à la fois liées, croisées et embrassées. En effet, chaque distique présente des rimes liées glacé/passé v.1-2). Mais les quatre distiques non dialogués créent également un effet de rimes croisées glacé/passé v.1-2 molles/paroles v.3-4 glacé/passé v.5-6 folles/paroles v.15- 16, soit : ABAB) et enfin des rimes embrassées sont visibles dans les trois premiers distiques passé v.2 molles v.3 paroles v.4 glacé v.5, soit ABBA). Enfin, ce poème présente une ambiguïté générique forte : est-ce une prosopopée comme semble nous l'indiquer le dernier distique ? [...]
[...] (Yeats reprendra ce mythe : l'homme se confie au rocher : je vivrai jusqu'à ce que je me sois couché pour mourir, couche-toi pour mourir.) Comme si, dans notre distique, la négation était déjà inscrite dans la question du spectre aimant. La question du spectre est tout aussi ambiguë que le vers précédent. Le seul nom s'oppose-t-il à d'autres noms ? Est- il alors une demande d'exclusivité dans le sentiment amoureux ? Ou faut-il comprendre que la simple prononciation de son nom pourrait faire battre le cœur de l'autre ? [...]
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