Colline, Jean Giono, nature, monde paysan, Trilogie de Pan, superstition, réalisme, communauté paysanne, culture classique, événements naturels, personnification de la nature, croyance, solidarité
Jean Giono, un écrivain à l'écart de tous les mouvements littéraires de son temps, publie son premier roman intitulé Colline en 1929. Premier volume de la Trilogie de Pan, c'est à cet ouvrage que l'auteur doit sa notoriété et son succès auprès de la jeunesse conquise par son style d'écriture novateur et par sa conception du bonheur simple. Cet extrait s'inscrit dans une scène d'attente, dans laquelle les habitants des Bastides Blanches appréhendent la « colère de la terre » (p. 54) annoncée par l'apparition du chat noir et par les propos délirants de Janet, le doyen mourant du hameau. Gondran, chargé d'interroger son beau-père sénile, est sollicité dès le petit matin par Maurras, son voisin, qui vient aux nouvelles de la nuit passée.
[...] Ainsi, l'écrivain met en lumière le mode de vie des paysans et leur dépendance à la nature et à la tradition, pour expliquer les contraintes que leur inflige l'hostilité de leur environnement. Si Giono est considéré comme un écrivain inclassable, son premier roman s'inscrit dans la littérature d'entre-deux guerre, dans laquelle l'écriture est propice à l'innovation. De nombreux auteurs ont profité de cette période pour s'affranchir de la norme et proposer de nouvelles formes d'écriture. C'est le cas de Louis Ferdinand Céline qui a introduit dans la littérature française l'écriture d'une langue parlée. [...]
[...] Une multitude de compléments circonstanciels de manière illustre le comportement anxieux des paysans. En effet, ce matin-là, aux Bastides Blanches, on sort « sur la pointe des pieds » (l. on se déplace « sans bruit » (l. on parle « à voix basse » (l. et quand Maurras s'exprime « d'une voix étouffée mais qui porte dans le calme du matin » et il se fait rappeler à l'ordre par Gondran qui lui « fait chut avec son doigt sur la bouche [ . [...]
[...] Toute la communauté est à l'affût, tout le monde « guette » : « Le fils Maurras » (l. « Marguerite » (l. 61) et « A la maison d'Arbaud [ . ] on guette aussi là » (l. 89). Mais au petit matin, c'est « toujours le silence » (l. et les villageois s'impatientent, ils trépignent (comme l'illustre l'énumération : « Il sort ; fait deux pas sur la place, monte sur un rouleau à blé pour mieux voir » l et 12). [...]
[...] C'est ainsi que Jean Giono transmet au lecteur sa vision d'une nature qui soumet l'Homme à ses exigences et les difficultés qu'endurent les paysans contraints de lutter sans cesse contre elle. Jean Giono s'est inspiré de sa région natale pour nous présenter sa vision du monde paysan. Cet extrait témoigne de la vivacité et de l'originalité de son écriture nourrie par sa culture provençale et par sa passion pour la littérature classique. La narration au présent et l'alliance d'un parler méridional avec une poétique structurée soulignent la singularité de l'auteur, qui immerge le lecteur dans l'ambiance pesante régnant chez les habitants des Bastides Blanches, pour le confronter aux difficultés de la vie rurale et aux rapports qu'entretiennent les paysans avec la nature. [...]
[...] C'est l'expression de sa puissance suprême qui confirme le mauvais présage lut dans l'apparition du chat noir et qui suscite cette crainte collective accaparant la vie des villageois. On peut considérer qu'il y a une ambivalence dans les métaphores que nous avons relevées plus haut pour traduire l'état d'esprit des paysans dans le cadre de leur intériorité. En effet, la nature personnifiée semble aussi prendre forme humaine pour attenter à la communauté. Outre l'ambiance pesante qu'illustre la métaphore : « Une épaisse couronne de violettes pèse sur le front pur du ciel » et c'est aussi l'image d'un poids prêt à tomber sur la population qui s'affirme, tout comme l'annonce d'une catastrophe prête à exploser (« le soleil monte pareil à une grenade » l. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture