Le passage à analyser se situe dans la célèbre tragi-comédie de Corneille (1606-1684) intitulée Le Cid, écrite en 1637.
L'intrigue raconte l'histoire de Rodrigue, fils de Don Diègue, et de Chimène, fille de Don Gomez. A la suite d'une querelle, - c'est Don Diègue qui a été choisi pour être gouverneur du Prince de Castille (v. 153), le fils aîné du roi Don Fernand en place de Don Gomez -, le père de Chimène donne un soufflet à Don Diègue. Celui-ci, trop vieux pour laver son honneur, demande à son fils Rodrigue de le faire à sa place. Rodrigue n'a pas le choix. Il aime Chimène, mais pour laver l'honneur familial, il doit tuer le père de la femme qu'il aime, ce qu'il fait. Chimène aime toujours Rodrigue, mais elle réclame vengeance et s'en va donc demander justice au roi. Don Diègue s'y précipite aussitôt pour défendre son fils.
[...] Mais on assiste à un procès particulier ; contrairement à un procès classique, où deux personnages parlent au nom de deux autres, ici Chimène parle en son nom personnel, tandis que Rodrigue, absent, est représenté par un avocat, son père. N'oublions cependant pas que Chimène vient de quitter le cadavre de son père. Ce serait donc trop voyant, trop artificiel si Chimène parlait de manière rhétorique. C'est pourquoi Corneille met le terme de plainte dans la bouche du roi, et non celui de discours par exemple (v. [...]
[...] Il ne conteste pas la culpabilité de l'assassin du Comte : celui- ci est bien mort et quelqu'un doit être puni pour cet acte. Donc au lieu de contester les faits, il détourne la culpabilité sur lui. En conclusion, on perçoit mieux pourquoi Corneille renvoie la décision du roi à l'acte suivant. Placé entre une orpheline maligne et un avocat coupable, le roi avait toutes les raisons de surseoir à sa décision. Dans cette séquence, le thème de l'amour disparaît au profit de l'honneur, véritable moteur de toute la fin de cet acte. [...]
[...] Le champ lexical choisi est le même que celui qui caractérisait les discours du Conte et de Don Diègue auparavant (murailles, batailles, courroux). Chimène utilise également l'hyperbole vient d'en couvrir la terre (v. 666). Ce sont donc les thèmes de la violence et de la souffrance qui caractérisent le propos de Chimène en ce début d'intervention. Ensuite, le thème de la plainte apparaît, que Corneille expédie en deux vers - 670). Après que le roi lui a dit qu'il lui servirait désormais de père, Chimène, encouragée par ce qu'elle a entendu, rebondit et on assiste désormais à un discours plus rhétorique. [...]
[...] 681), et lui demande de faire respecter la loi : Ne souffrez pas que . Règne . une telle licence (v. 681-682). - Enfin, Chimène conclut son intervention sur huit vers en réclamant la vengeance, thème qui constitue l'essentiel de cette dernière partie Enfin mon père est mort, j'en demande vengeance Vengez-là et 691). La locutrice manie en outre un certain nombre de figures de style : la métaphore et la personnification : Par cette triste bouche (v. 680). Cet enchaînement dans le discours transforme progressivement une orpheline en larmes en une étonnante plaideuse. [...]
[...] Le roi devient une sorte d'arbitre et donc un personnage actif. Terminons cette analyse avec le discours de Don Diègue, longue tirade de 36 vers. Étrangement, on assiste au même changement que Chimène, mais dans l'ordre inversé. Don Diègue doit répondre à Chimène, mais il doit également défendre Rodrigue. Or, sur 36 vers, seuls sept sont consacrés à Rodrigue. Don Diègue est donc l'unique sujet de son discours, que l'on pourrait subdiviser ainsi : - Au début, Don Diègue fait part de ses réflexions liées à son âge à 700). [...]
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