Yvain sort victorieux du combat contre le serpent ; le lion une fois sauvé, au lieu de l'attaquer comme il le pressent, lui témoigne toute sa reconnaissance.
La relation qui se met en place entre Yvain et le lion suit un modèle hiérarchique qui fait penser à la société d'ordres très distincts qui perdure à la fin du XII siècle. Dans cet extrait, le lion se met au service du chevalier : il le nourrit, "Quant ochis l'eut, (...) si l'en emporta / Tant que devant son seigneur vint" (...)
[...] La deuxième étape de cette quête est la découverte de la proie par un autre sens : la vue, Quant il vit (v.3444). Cette description précise des étapes de la chasse met en avant l'importance des sens et notamment de l'odorat. Ce sens est le plus souvent accompagné d'un autre éléments : le vent, il senti dessous le vent (v.3441). Le vent, associé à l'odorat et répété à plusieurs reprises, sert ici de lien entre la proie et le fauve, avant le contact visuel. [...]
[...] Cette caractéristique s'applique à la scène du lion qui veille. Le personnage acquiert un statut plus divin. La présence de cet être particulier aux côtés d'Yvain indique que le héros a changé de statut : de simple chevalier il est devenu à la fois seigneur et souverain. En effet, le lion est un animal qui symbolise la noblesse et la royauté et, dans moultes légendes, les lions respectent le sang des rois et permettent d'élire les souverains. D'un statut de nomadisme et d'errance, Yvain est passé à la permanence Tous jours ; il est un être d'élection, il est choisi par le lion. [...]
[...] Quant ochis l'eut, si le geta Seur son dos, si l'en emporta Tant que devant son seigneur vint, Qui puis en grant chierté le tint Pour la grant amor qu'en li ot. Ja fu pres de nuit, si li plot Quë ileuc se herbegeroit Et du chevroil escorcheroit Tant comme il en vaurroit mengier. Lors de commenche a escorchier : Le cuir li fent deseur la coste, De le longne .i. lardel li oste ; Et trait le fu d'un caillau bis, Si l'a de seche busche espris, Et met en .i. [...]
[...] L'attaque de la proie n'est évoquée qu'à travers le vers 3447, il si ot au premier saut Le réalisme de la scène de chasse est mit en évidence par le toucher. Le lion dévorateur d'un herbivore est un archétype qui convient à l'exaltation sanguinaire du guerrier ; la violence et la sauvagerie du lion apparaissent au vers 3448, Puis si en boit le sanc tout chaut Le côté sanguinaire du lion s'oppose à Yvain qui représente le chevalier courtois, cette différence transparaît dans la description très précise du dépeçage du chevreuil (des vers 3456 à 3459) et est accentuée par la répétition du mot escorchier Dans ces deux vers, le mot est à la fois appuyé par l'allitération en ch : chevroil escorcheroit (v.3436) et commenche a escorchier (v.3458), et par sa position en fin de rime. [...]
[...] Il devient à la fois un personnage complexe à part entière et une figure indissociable d'Yvain : il est son double sauvage. Son apparition donne un nouveau statut à Yvain, qui devient un être choisi par le lion et acquiert ainsi le rang de souverain. Le héros sorti de sa folie revient vers la société avec une nouvelle identité (intrinsèquement liée au lion). L'arrivée sur le lieu de l'ancien royaume d'Yvain du lion annonce la prochaine aventure d'Yvain : la reconquête du cœur et du royaume de la dame de Landuc. [...]
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