Le Cheval d'Orgueil, Pierre Jakez Hélias, paysans laborieux, pays Bigouden, Bretagne
En langue bretonne, il n'existe pas de mot pour qualifier les vacances, et l'idée même d'oisiveté est synonyme de paresse et de honte. Le livre de Pierre Jakez Hélias sur sa vie et celle de sa famille entre la fin du XIXème siècle et le début des années 1970 met donc le travail au centre du récit. Puisque la vie est un labeur perpétuel, il s'agira de nous demander comment s'organise la vie laborieuse d'un paysan Bigouden durant cette période.
[...] Le roman se déroule dans les villages de Pouldreuzic et Plozévet. « Les paysans que j'ai connu n'étaient pas une classe mais une société complète » Du fait de son isolement géographique et linguistique (le breton est la seule langue parlée jusqu'au début du XXème siècle, et le français ne s'impose vraiment qu'à partir de 1930), le pays Bigouden est une région relativement hermétique et centrée sur elle-même, un monde à part entière où le temps semble figé jusqu'à son bouleversement par la première guerre mondiale, et c'est à cette société figée que nous allons tout d'abord nous intéresser. [...]
[...] L'achat de terres et l'accès à la propriété restent cependant un rêve, que peu réaliseront. Le loisir est un concept qui n'existe pas : pendant son temps libre, on fabrique des objets de la vie courante, on fait de menus travaux de réparation + pour les femmes : crochet et fabrication de dentelle. Seuls les événements inhabituels sont l'occasion de faire la fête nourriture+ musique + danse) : que ce soient les fêtes religieuses, les travaux qui impliquent la participation de tout le corps social (tels que la réfection du sol d'une maison ou les moissons) et les évènements familiaux (mort du cochon, premier pantalon, décès, entrée au lycée, baccalauréat). [...]
[...] Un paysan travaille tous les jours sauf le dimanche, et le modèle familial paysan décrit par P-J Hélias est le modèle de la famille modeste qui possède une maison composée de deux pièces, où cohabitent trois générations, une petite étable, un ou deux cochons et une vache (un cheval pour les plus fortunés →le bétail est le bien le plus précieux des paysans). La famille loue des champs à un maître de ferme. C'est modèle le plus répandu en pays Bigouden. [...]
[...] De plus, il n'y a aucun moyen de locomotion mis à part la marche à pied ou la bicyclette, ce qui renforce l'isolement (prendre le train est un événement exceptionnel). Cet isolement provoque une grande étroitesse d'esprit : par exemple, on ne mange ni tomates, ni champignons, ni produits de la mer (perçus comme bizarres et toxiques), on ne se laisse pas prendre en photo, on est hostile à la mer et aux marins →tout ce qui est étranger est inquiétant, prudence extrême, rejet de la nouveauté, méfiance des gens qui parlent beaucoup, qui ont un savoir théorique →le paysan est un homme d'action. [...]
[...] Les guerres entraînent un retour à la terre et permettent aussi aux paysans de prendre conscience de leur importance dans la société : ils produisent la nourriture, et les bourgeois des villes leurs sont soumis. →L'éducation et l'unification culturelle: La génération de l'auteur (qui est né en 1914) est la première à accéder à l'éducation et à l'enseignement supérieur, ainsi qu'à l'apprentissage systématique de la langue française. L'instruction prend le pas sur la propriété dans le système de valeur des paysans, et on ne rêve plus de posséder des terres mais de rentrer dans la fonction publique, vue comme un formidable ascenseur social, ou de devenir ouvrier de l'industrie. [...]
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