Le 9 e chapitre du livre 3 se caractérise par une reprise de la rédaction des mémoires, après un long arrêt de 3 ans et demi. L'auteur doit donc justifier la reprise de la plume (« disons d'abord ce qui me fait reprendre la plume »).
Cet épisode très connu de la grive de Montboissier s'inscrit dans ce cadre de justification. Par conséquent, dans ce cadre, on est en présence d'un texte atypique (inattendu) car l'écriture dans ce passage renvoie au présent du narrateur et non à son passé.
On a donc ici une signature du pacte autobiographique. On pourra se demander ici quels sont les rapports entre l'écriture et le temps.
[...] La promenade prend encore une dimension symbolique : il s'agit du chemin de la vie. Ce que Chateaubriand se demande ici, c'est quel sera le jour de sa mort, de façon détournée. La réponse est éludée : on passe aussitôt à des impératifs qui disent l'urgence de continuer à écrire, comme si la rédaction des mémoires était le seul recours contre la mort. Conclusion L'autobiographie n'est pas qu'un récit par l'auteur de sa propre vie, c'est aussi une réflexion personnelle sur le temps qui passe et sur le rôle de l'écriture. [...]
[...] Cette réflexion s'épanouit pleinement à travers les antithèses, les asyndètes (ou le mais adversatif) et aussi à travers la valeur des temps (imparfait au présent qui exprime la nostalgie) C'est la valeur des temps qui reflète le cheminement de la réflexion heures fuient et m'entraînent d'où l'emploi d'un présent gnomique qui amène à une loi impitoyable du temps qui conduit vers la mort et menace sans cesse l'autobiographe. Le passé composé et le futur indiquent l'urgence d'écrire et les incertitudes, l'impératif présent, lui, traduit le mouvement même de l'écriture. [...]
[...] Que sont devenus Henri et Gabrielle ? Ce que je serai devenu quand ces Mémoires seront publiées. Je fus tiré de mes réflexions par le gazouillement d'une grive perchée sur la plus haute branche d'un bouleau. À l'instant, ce son magique fit reparaître à mes yeux le domaine paternel. J'oubliai les catastrophes dont je venais d'être le témoin, et, transporté subitement dans le passé, je revis ces campagnes où j'entendis si souvent siffler la grive. Quand je l'écoutais alors, j'étais triste de même qu'aujourd'hui. [...]
[...] On a donc ici une signature du pacte autobiographique. On pourra se demander ici quels sont les rapports entre l'écriture et le temps. Valeur des antithèses : l'opposition entre deux temps l'opposition entre le passé et le présent On remarque une première antithèse entre la tristesse et le bonheur cette première tristesse était celle qui naît d'un désir vague de bonheur, celle-ci renvoyant à l'état d'âme paradoxal qui est le mal du siècle Cependant, les antithèses renvoient surtout à l'opposition passé/présent : félicité que je croyais atteindre/félicité insaisissable ; alors aujourd'hui alors renvoie à autrefois ; première tristesse d'une part et tristesse que j'éprouve actuellement d'autre part.) On a donc ici une opposition entre deux temps : d'un côté, le passé irrémédiablement perdu avec l'enthousiasme lié à l'innocence et aux illusions de la jeunesse, et le présent marqué par la désillusion et la mélancolie, présent qui est aussi le temps de l'écriture pour le mémorialiste. [...]
[...] On voit également que toute autobiographie est une réécriture et une réinterprétation de sa propre vie. Ce passage annonce la réflexion proustienne sur la mémoire involontaire. [...]
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