Ce poème est extrait de Les Fleurs du Mal de Charles Baudelaire, recueil publié en 1861. Recueil censuré pour son inadéquation aux bonnes règles de la morale et de la pudeur, il ose s'attaquer à des motifs peu conventionnels, comme celui de cette « charogne ». XXIXe poème de la première partie du recueil, intitulée « Spleen et Idéal », il reflète bien cette double tendance du poète à se diriger à la fois vers la fascination mélancolique pour le mal et le laid (le « spleen » ) et à tenter de s'élever plus haut vers une Beauté transcendante, « idéale ». Il décrit un objet horrible, le plus horrible qu'on puisse imaginer peut-être, et pourtant ce poème est un poème d'amour puisqu'il s'adresse à la femme qu'il aime. Comment expliquer cette étrange manière de s'adresser à l'être aimé ? (...)
[...] C'est donc une vraie déclaration d'amour. Cependant le poète ne nous parle pas de cette femme, nous ne savons rien sur elle : elle n'existe qu'à travers les clichés poétiques des dernières strophes(Etoile de mes yeux, soleil de ma nature, Vous, mon ange et ma passion!). Les Beautés auxquelles est confronté le lecteur ne sont pas celles d'une femme mais celles de la femme en général comme symbole de l'inspiration poétique. C'est donc davantage un poème d'amour de la Poésie : la forme (poétique) et l'essence divine sont une même chose : ici, c'est même la charogne qui est rendue belle par l'art, simplement en étant le thème choisi du poème. [...]
[...] Définition. Lien avec la charogne. [...]
[...] Une vanité violente. Ce poème rejoint la tradition du memento mori de la vanité. (memento = Rappelez-vous). Structure habituelle : contemplation d'un objet qui évoque la mort (ruines par exemple, ici une charogne) puis comparaison avec l'homme (ici la femme aimée)( et pourtant vous serez semblable à cette ordure Premier choc : Eros et Thanatos L'effet de violence est recherché dès la construction de la strophe 1 : deux vers de calme beauté (sonorités douces et vers 2 frise le cliché) ménagent un effet de surprise par contraste (avec charogne infâme à la rime, en antithèse avec mon âme mise en parallèle qui annonce la violence de la comparaison finale). [...]
[...] - faiblesse de la femme qui manque de s'évanouir. - faiblesse des métaphores qui font l'éloge de la femme : elles sont empruntées aux pires clichés de la poésie amoureuse. - Au contraire, la charogne se donne une certaine supériorité parce qu'elle est cynique ; elle semble se moquer de la faible femme ; elle peur de rien, ni du désir le plus physique ni de l'horreur qui ne la rend que nonchalante La leçon à en tirer de manière plus générale - Cette violence n'est pas un accident : elle est le signe de l'importance de l'évènement qu'est la mort. [...]
[...] Elle est vivante comme une fleur qui s'épanouit. Cette comparaison est violente dans son caractère inattendu. Et, en rime interne, Baudelaire fait encore rimer fleur avec puanteur Elle se nourrit aussi du vivant (les vers mangeront la belle) comme le vivant se nourrit d'elle (la chienne, les floraisons grasses», cuire) : il y a là une frontière qui s'efface entre le mort et le vivant, en même temps que la forme de la charogne (les formes s'effaçaient ) et cet effacement est inquiétant. [...]
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