La rencontre entre Candide et le nègre de Surinam est comme la plupart des aventures du héros, narrée de manière invraisemblable : le « nègre », en piteux état, se lance dans une longue tirade sur sa condition d'esclave. Nous sommes donc face à un texte argumentatif, (...)
[...] Il est tout d'abord présenté en position couchée, ce qui contraste avec Candide et Cacambo, qui sont debout. L'esclave paraît dès le premier abord diminué, étendu par terre Il est affaibli, blessé il manquait à ce pauvre homme la jambe gauche et la main droite et passif, attendant son maître sans plainte ni revendication, constatant l'usage de la mutilation. L'utilisation d'euphémismes crée aussi un personnage humble : de ses parents qui l'ont vendu et finalement réduit à cet état, il se contente de dire : je ne sais pas si j'ai fait leur fortune, mais ils n'ont pas fait la mienne C'est par le jugement de l'auteur, qui le désigne comme un pauvre homme et l'attitude et les paroles de Candide que le lecteur est invité à réagir face à l'esclavage : Candide parle d' état horrible se lamente à la fin du passage ô Pangloss hélas ! [...]
[...] Voltaire se lance, à l'occasion de la rencontre de son héros avec un esclave, à un réquisitoire féroce et organisé contre l'esclavage. Inséré dans la trame narrative du conte, il se révèle être aussi une nouvelle dénonciation de l'Optimisme, qui affirme la nécessité du mal sur terre, en l'incluant dans une chaîne de causalité devant mener au bien. Si la critique est efficace, c'est aussi parce que l'auteur a su utiliser les ressources du récit et jouer de différents registres. [...]
[...] Le nom que Voltaire a choisi de donner à l'esclavagiste participe du même registre. Si l'on peut penser que l'auteur a fait d'une pierre deux coups en parodiant le nom d'un libraire hollandais avec qui il avait eu des démêlés, Van Düren, le nom Vanderdendur par ses sonorités, évoque la dureté, la cruauté du maître La désignation des religieux est elle aussi polémique : ils sont appelés fétiches par l'esclave ; or, ce mot désigne un objet, une représentation d'une divinité, à laquelle les peuples primitifs rendaient un culte : l'auteur laisse entendre par cette désignation qu'il s'agit de faux dieux, et démontre dans ce passage qu'ils agissent en contradiction avec les principes de la religion. [...]
[...] Candide, paru en 1759, montre le parcours initiatique du héros éponyme, qui quitte son château protégé, persuadé de vivre dans le meilleur des mondes possibles et se retrouve confronté au mal sous différentes formes. Voltaire fustige ainsi la théorie de l'Optimisme, soutenue notamment par Leibniz dans sa Théodicée, selon laquelle le mal est nécessaire sur terre. Il ose aussi des critiques très fortes de la guerre, de l'Inquisition, ou de l'esclavage, pratique légale que beaucoup de philosophes dénoncèrent. Au chapitre 19, Candide rencontre au Surinam un esclave noir qui dresse un tableau peu reluisant de sa condition. [...]
[...] La fin du passage constitue une sorte de conclusion : l'esclavage est une abomination et l'optimisme est la rage de soutenir que tout est bien quand on est mal Le texte semble donc suivre la démarche expérimentale revendiquée par les philosophes du XVIIIème siècle : ils partent de l'observation avant de chercher les causes et de conclure. Ce refus des a priori leur permet d'accéder à la vérité : ici, la vérité se trouve dans l'horreur de l'esclavage. Voltaire donne des arguments contre cette pratique dans un réquisitoire indirect. La dénonciation de l'inhumanité de l'esclavage Voltaire met son lecteur face à une victime de l'esclavage, afin de lui montrer l'inhumanité de cette pratique. L'esclave n'est en effet pas considéré comme un homme. [...]
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