Nous allons étudier comment Bérénice s'efforce de prouver le caractère infondé des craintes de Phénice par rapport à son mariage avec Titus, en analysant la forte charge émotionnelle qui empreint les propos de cette femme passionnée, qui entretient l'illusion d'un amour possible (...)
[...] Elle restitue ainsi à Phénice et, par-delà, au spectateur, une scène à très forte charge émotionnelle. Bérénice ressasse, chante son bonheur, mais c'est peut-être surtout pour convaincre Phénice, mais aussi elle-même (dans une perspective auto-persuasion que Titus l'épousera Elle semble se refuser obstinément à envisager le pire. En fait, en peignant Titus, Bérénice se dévoile elle-même Parler de Titus, pour elle, c'est le convoquer au sens le plus fort du terme, le rendre comme présent. Au v 301, l'antéposition de De cette nuit permet de la mettre en valeur avec emphase. [...]
[...] En fait, Bérénice peint Titus comme si c'était un homme si rayonnant, si puissant qu'il ne pourrait s'incliner devant le réalisme politique et la répudier, la trahir Un bref sursaut survient au v 316, avec un Mais à l'attaque. C'est presque comme si elle s'était perdue dans ses paroles et revenait soudain à la réalité, comme si elle se raccrochait à Phénice 317) Passionnée, Bérénice ne semble plus vraiment maitresse d'elle-même ; elle est ainsi en position de COD : où M'emporte d'où un sentiment de dépossession si l'on peut dire, renforcé par l'adjectif charmant au sens étymologique (un sort), à la rime. On quitte alors l'hypotypose : un retour au présent s'effectue. [...]
[...] Ces flambeaux, ce bûcher, cette nuit enflammée, Ces aigles, ces faisceaux, ce peuple, cette armée, Cette foule de rois, ces consuls, ce sénat, Qui tous de mon amant empruntaient leur éclat; Cette pourpre, cet or, que rehaussait sa gloire, Et ces lauriers encor témoins de sa victoire; Tous ces yeux qu'on voyait venir de toutes parts Confondre sur lui seul leurs avides regards; Ce port majestueux, cette douce présence . Ciel! avec quel respect et quelle complaisance Tous les cœurs en secret l'assuraient de leur foi! Parle : peut-on le voir sans penser comme moi Qu'en quelque obscurité que le sort l'eût fait naître, Le monde en le voyant eût reconnu son maître? Mais, Phénice, où m'emporte un souvenir charmant? [...]
[...] COMMENTAIRE DE TEXTE LITTERAIRE. Bérénice, Acte scène 5 (vers 286 à 326) Racine Rappel du texte à commenter : Scène V. Bérénice, Phénice Phénice Que je le plains ! Tant de fidélité, Madame, méritait plus de prospérité. Ne le plaignez-vous pas ? Bérénice Cette prompte retraite Me laisse, je l'avoue, une douleur secrète. [...]
[...] Au v 302, ce sont peut-être plutôt les yeux de Bérénice qui revoient défiler ce délicieux spectacle ! La reine est tellement obnubilée, possédée par son image qu'elle s'imagine que tous partagent son enthousiasme ! Au v 303 au v 305 se trouve une accumulation à 10 termes qui s'étire sur 3 vers ; cette accumulation est d'ailleurs rythmée par l'anaphore de l'adjectif démonstratif à valeur déontique et emphatique. Insistons bien sur la musicalité des vers, comme les vers 303-304, avec des allitérations en des assonances en et en Bérénice insiste beaucoup sur la luminosité de la scène, comme l'indique une série ternaire évoquent des sources lumineuses assez spectaculaires En fait, la présence est également, d'une certaine manière, métaphorique : elles disent l'embrasement intérieur de la reine, qui brûle d'un amour passionné La cérémonie s'avère pour le moins impressionnante, eut égard à l'abondance des individus conviés Au v 306, les 10 éléments accumulés sont ramassés dans le pronom tous Titus intervient dans la scène ; il en constitue même le centre, l'empereur est la source essentielle de lumière dans cette nuit d'encre Visiblement, Titus est ici plus lumineux que les flambeaux, les flammes elles-mêmes ! [...]
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