Cette scène fait interagir deux personnages féminins déjà rencontré à l'Acte I : Suzanne et la Comtesse. Ce couple maitre/valet au féminin apparait ici pour la première fois seul en scène. La Comtesse est la maitresse de Suzanne qui est sa femme de chambre. La comtesse a donc une supériorité hiérarchique vis-à-vis de Suzanne, supériorité qui se manifeste à plusieurs reprises dans cette scène, notamment parce que la Comtesse tutoie Suzanne alors que Suzanne vouvoie sa maitresse et l'appelle "Madame" : (...)
[...] Quant à Suzanne, elle apparait ici comme une personne fidèle à sa maitresse, prête à lui raconter les moindres paroles proférées par le Comte à son encontre : Je n'ai rien caché à Madame. Ayant aboli le droit du seigneur le Comte se voit obligé de courtiser Suzanne pour obtenir ses faveurs. Or, dans la mentalité et le langage de l'époque, courtiser quelqu'un, ou simplement l'aimer, c'est se mettre à son service. Ainsi, Suzanne, même si elle reste fidèle à Figaro, est très consciente du parti qu'elle peut tirer de cette comédie amoureuse. [...]
[...] La chaleur a ici une portée dramaturgique. Elle sert à justifier l'ouverture de la fenêtre d'où on verra partir le Comte et par laquelle sautera Chérubin. Il y a donc un respect mutuel qui s'établit entre les deux femmes. Le but n'en est pas moins la réunion de deux couples séparés par l'inconstance d'un seul des protagonistes : le Comte. Face à l'adversité qu'il représente, les deux femmes ont donc intérêt à s'allier. La seule aide commune qui puisse leur être efficace à toutes les deux est Figaro : Lui seul peut nous y aider Les deux femmes passent donc un pacte implicite qui va impliquer Figaro. [...]
[...] Ce ton qu'utilise la Comtesse est davantage le ton que l'on emploie pour parler à une amie, traitée en égale, que celui d'une supérieure qui garderait ses distances vis-à-vis d'une servante. On note l'utilisation du champ lexical de l'amour, avec des termes tels que aimé, tendresse, amour, jalousie ce qui prouve que son attachement est resté intact. Elle avoue son tort mais elle effectue également plusieurs généralisations Comme tous les maris, les hommes sont bien coupables ce qui illustre un certain fatalisme. Elle ne se fait pas beaucoup d'illusions sur la suite de leur relation. [...]
[...] Pour Chérubin, le ruban est un talisman amoureux et acquiert une vertu presque magique puisqu'il va s'en servir pour panser sa plaie au bras dans la suite de la pièce. Pour la Comtesse, il devient un souvenir sentimental. Même si elle semble surprise, voire choquée d'apprendre que c'est désormais Chérubin qui le possède : Mon ruban ? . quelle enfance ! elle n'en est pas moins troublée qu'il ait un objet si intime lui appartenant. Il fonctionne donc dans la pièce comme un lien entre Chérubin et la Comtesse. [...]
[...] Beaumarchais, dans Le Mariage de Figaro, a donné à ses personnages une profondeur humaine et parfois émouvante, que n'ont pas les valets traditionnels de la comédie, et qu'il n'avait pas lui-même dans Le Barbier de Séville. Le verdict psychologique que la Comtesse prononce sur ses rapports avec son mari n'est pas seulement juste : il va inspirer la suite de l'action. Une scène annonciatrice La Comtesse décide de ne plus se réfugier dans ses langueurs de femme délaissée. Avec l'aide de Suzanne, elle prend les rênes de l'action. [...]
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