Introduit par l'anaphore de la locution verbale "Que diras-tu "(vers 1 et 2), il montre bien l'importance pour le narrateur de parler à cette femme. Ainsi, la description que le poème fait d'elle se révèle être une véritable mise en scène d'un bel amour. C'est le cas du cortège que mime l'alexandrin très processionnel "À la très-belle, à la très-bonne, à la très-chère" (vers 3), par son rythme ternaire et l'anaphore de la formule syntaxique "à la très" suivie d'un adjectif. La femme aimée semble alors être douée d'illumination, le tiret entre l'adjectif féminin et le superlatif montrant que, pour le poète, elle est au sommet de sa beauté et de sa bonté. Elle n'est pas qualifiée par des adjectifs communs mais par le plus haut degré de ces derniers, et ce à jamais (d'où la symbolique du tiret).
b- Une dimension sensuelle
Néanmoins, cette description peut apparaître assez mystique. Ainsi, tous les attributs physiques de celle qui, dans Tout Entière (LXI), est décrite comme ayant un "corps charmant", sont modulés pour échapper à toute matérialité. Baudelaire dessine sa silhouette à l'aide de locutions comme "le regard divin" (vers 4), "Sa chair spirituelle" (vers 7) ou encore "le parfum des Anges" (vers 7), image poétique révélant le désir sublimé qu'elle inspire à Baudelaire, puisque la majuscule du terme "Anges" dématérialise, en quelque sorte, la femme qui subit ainsi une métamorphose mystique, étant de plus entourée d'une lumière spirituelle ("Et son oeil nous revêt d'un habit de clarté", vers 8 ; "Son fantôme dans l'air danse comme un flambeau", vers 11).
En outre, l'énonciation ultime du fantôme permet au "Je" (vers 14) d'endosser trois rôles : cette femme est tout d'abord l'"Ange Gardien" tutélaire, en opposition à l'ange maudit et tentateur (elle protège et surveille). Puis, elle est la "Muse", l'inspiratrice du poète, et enfin la Madone, finalisant sa dimension angélique.
L'alternance des rimes masculines et féminines, notamment dans le second tercet ("-bo" et "-done") accentue la beauté de cette femme (...)
[...] Mais sur le conseil d'un ami, il y renonce. Le titre définitif, trouvaille qui est attribuée au critique littéraire Hippolyte Babou (1824-1878), repose sur l'oxymore que Charles Baudelaire a tenu à entretenir durant toute sa vie littéraire. En effet, il considère la nature comme laide, par définition et la beauté comme artificielle. Il inclut ainsi la modernité comme motif poétique et rompt avec l'esthétique classique. La première des six sections, intitulée Spleen et idéal, est de loin la plus fournie, ne comptant pas moins de quatre-vingt-cinq poèmes. [...]
[...] Comme pour la lumière précédemment, ce calme et cette douceur présents tout au long du poème s'opposent à la corruption des Fleurs du Mal, tout en figurant dans le recueil. Conclusion Incorporé au cycle consacré à Apollonie Sabatier, ce poème est particulièrement évocateur de cette femme fantasmée par Baudelaire. Elle incarne l'amour spiritualisé, répondant à la quête ardente et nostalgique d'un au-delà sentimental. Contrairement à la Vénus noire Jeanne Duval, incarnation de l'amour sensuel, le poème n'en livre aucun détail physique, suggérant le sentiment de l'auteur pour l'amour : un remède aux maux de notre âme à condition d'être maintenue hors des contingences charnelles. [...]
[...] Puis, elle est la Muse, l'inspiratrice du poète, et enfin la Madone, finalisant sa dimension angélique. L'alternance des rimes masculines et féminines, notamment dans le second tercet -bo et -done accentue la beauté de cette femme. La mise en scène est bonifiée par un jeu sur les cinq sens qui s'entremêlent : le toucher, comme le terme chair (vers le laisse supposer, qui est lié à l'odorat (le parfum, vers lui-même lié à la vue (son œil, vers puis au goût, puisque le poète doit savoir apprécier le Beau (vers 13). [...]
[...] Cet éclat s'oppose au clair-obscur des Fleurs du Mal. Une échappatoire au Spleen Cet amour pour Apollonie Sabatier, léger et spirituel, se veut une façon d'échapper au Spleen. La jeune femme ne cesse d'exercer son pouvoir envoûtant, comme le suggère le parallélisme des vers 9-10 : Que ce soit dans la nuit et dans la solitude, Que ce soit dans la rue et dans la multitude Se détachant du reste du sonnet, ils montrent qu'elle est toujours là, dans un isolement nocturne ou dans un lieu peuplé comme le met en valeur l'opposition des rimes riches solitude et multitude, placées en fin de vers. [...]
[...] C'est le cas du cortège que mime l'alexandrin très processionnel À la très-belle, à la très-bonne, à la très-chère (vers par son rythme ternaire et l'anaphore de la formule syntaxique à la très suivie d'un adjectif. La femme aimée semble alors être douée d'illumination, le tiret entre l'adjectif féminin et le superlatif montrant que, pour le poète, elle est au sommet de sa beauté et de sa bonté. Elle n'est pas qualifiée par des adjectifs communs mais par le plus haut degré de ces derniers, et ce à jamais (d'où la symbolique du tiret). Une dimension sensuelle Néanmoins, cette description peut apparaître assez mystique. [...]
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