Poème de Baudelaire, extrait du recueil des Fleurs du Mal publié pour la première fois en 1857, L'Invitation au voyage est inspiré par une femme, Marie Daubrun, comédienne qui jouait La Belle aux cheveux d'or au théâtre et qui sera un temps bref la maîtresse de l'auteur, avant de le quitter pour son ami et poète également, Théodore de Banville.
La question principale qui nous préoccupe ici est de savoir pourquoi Baudelaire s'adresse à elle sans aucune allusion sensuelle à la relation qu'ils entretiennent ?
Nous travaillerons également sur la forte musicalité du texte composé en vers impairs et rappellerons, à ce propos, ces vers de Verlaine, autre poète majeur du XIXème, De la musique avant toute chose, / Et pour cela préfère l'Impair (extraits de L'art poétique, dans Jadis et Naguère) (...)
[...] La jeune-femme est flattée, rassurée, à la manière dont on flatte ou rassure un enfant. Les soleils couchants Revêtent les champs, Les canaux, la ville entière, D'hyacinthe et d'or ; Le monde s'endort Dans une chaude lumière La phase finale du poème est celle de l'endormissement. Comme le dit Valmont dans le film de Stephen Frears tiré des Liaisons dangeureuses 4 : Ses yeux se ferment. Le soleil, recouvrant progressivement l'ensemble du paysage est remonté comme une couverture sur le corps de la jeune femme. [...]
[...] C'est vers cet endroit que tend Baudelaire. Le mourir est ici synonyme d'un lieu tellement parfait qu'on ne saurait souhaiter de possibilité de retour, un havre de paix où l'homme se met à l'abri de la vie. Le poète invite donc sa compagne à se retirer du monde ambiant pour un ailleurs idéal. Au pays qui te ressemble! À nouveau ce mouvement d'aller et retour. D'abord Baudelaire invite Marie Daubrun à s'échapper là-bas pour la ramener finalement à elle- même. Comment expliquer cette nouvelle antithèse? [...]
[...] Nous quittons maintenant l'univers de la chambre rêvée, pour, dans cette troisième strophe, découvrir le paysage de la ville imaginaire que dépeint le poète. Vois sur ces canaux Dormir ces vaisseaux Dont l'humeur est vagabonde ; Le poète s'inspire vraisemblablement ici de la ville d'Amsterdam en Hollande, la ville aux mille et un canaux. Les navires qui s'y trouvent sont à l'arrêt, renforçant l'idée de calme qui règne dans le poème. La ville est au repos. Il faut rappeler le parallèle qu'effectue le poète entre la jeune-fille et le paysage, l'invitant donc elle aussi au repos. [...]
[...] La destination du voyage n'est pas déterminée, le poète reste flou. Le terme là-bas ainsi que les termes brouillés mystérieux etc., que nous verrons plus loin, renvoient au champ lexical du mystère, à une atmosphère propice au rêve et chère à l'enfance. Le terme ensemble renforce encore ce lien de possession qu'entretient le poète pour la destinataire. Aimer à loisir Le champ lexical de l'amour avec les termes : Mon Ma douceur ensemble aimer charmes etc. Cet amour particulier que nous cherchons encore à déterminer, possessif, chaste, l'amour d'un père pour sa fille, d'un grand-frère pour sa sœur? [...]
[...] Le poète, ici, au chevet de la jeune fille en pleurs lui murmure une chanson réconfortante. Les cinq termes ordre beauté Luxe calme et volupté font figure d'accumulation renvoyant à un monde paradisiaque de bien-être apaisé. Le réconfort est encore ici à l'honneur, il s'agit de consoler une fille qui pleure, même si son chagrin n'est pas forcément sincère. Des meubles luisants, Polis par les ans, Décoreraient notre chambre ; Nous passons à la seconde strophe. Il faut noter que la première concernait plus proprement l'invitation à ce voyage merveilleux. [...]
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