Baudelaire, "Avec ses vêtements" : commentaire

Résumé du document

Baudelaire est un des seuls poètes de la première moitié du XIXème siècle qu'appréciait Rimbaud : dans son Alchimie du verbe, celui-ci a qualifié Baudelaire de "vrai Dieu". En effet, très influencé par certains aspects du romantisme, notamment l'importance donnée à l'imagination, ainsi que l'ambition d'explorer des domaines inconnus, Baudelaire a été à l'origine de la révolution poétique du milieu du XIXème siècle. Ce qui l'a fait considérer comme le chef de file des symbolistes.

Le sonnet que nous avons à étudier appartient au recueil Les Fleurs du mal paru en 1857. Numéroté 27 sur les 126 pièces du livre, ce texte fait partie de la première section intitulée "Spleen et Idéal". Il peut être intéressant de le rapprocher des poèmes voisins, notamment le n° 28 "Le serpent qui danse", car Baudelaire a particulièrement veillé à l'ordre dans lequel ses textes étaient présentés (...)

Extraits

[...] Serpent = figure de l'Eros femme L'œil du serpent est nu, n'a pas de paupière, pas de cil/sourcil, symbole érotique Le corps du serpent est froid Le serpent charme son charmeur Le reptile évoque l'allure aguichante de la femme à la démarche chaloupée Etre ambivalent, il est à la fois son venin et son antidote, comme le suggère le motif du serpent associé à un bâton où l'on peut voir une figuration du caducée ; à la fois oeuvre du jongleur, mais aussi il échappe au jongleur et vit sa propre vie Structures anthropologiques de l'imaginaire : hindou et chinois = le bâton serait l'axe du monde, autour duquel monte et descend l'énergie vitale. Interprétation sexuelle : le bâton, principe masculin, mort, Yin ; les serpents, principe féminin, vie, Yang. juive = dans désert, Moïse érige un serpent au bout d'un bâton ; ceux qui le regardent sont guéris de la morsure des serpents venimeux. [...]

[...] Dans la religion hindouiste, Shiva, le dieu de la danse porte un serpent autour du cou et rythme la destruction, puis la re-création du monde. Dans sa main supérieure droite, il tient un tambour qui donne la cadence La correspondance entre la sensation brute et la surnature se fait par la loi de l'universelle analogie défendue par certains ésotéristes et aussi des poètes comme Victor Hugo. Dans ce sonnet, quatre comparaisons sont introduites par la préposition comme souvent accentuée en deux syllabes, et dont Baudelaire fait un large usage. [...]

[...] En faisant rimer indifférence avec souffrance Baudelaire établit un évident lien de causalité. L'indifférence de la femme, de la beauté qui se dérobe, mais aussi de la mer c'est-à-dire peut-être de la mère, crée une véritable souffrance chez le poète. On connaît les relations délicates du poète avec sa mère Caroline. La dureté est repérable dans deux matériaux du vers 12 : l' acier est un alliage très dur de fer et de carbone ; le diamant est la pierre précieuse la plus dure. [...]

[...] En effet, le poème fait référence à plusieurs traditions spirituelles. Nous avons déjà rappelé l'épisode biblique du serpent guérisseur. Le caducée d'Esculape renvoie à la même double fonction du venin : à la fois poison qui tue, et élément servant à préparer son remède. Le demi-dieu Hermès est messager comme l'« ange biblique ou chrétien, et son caducée, bâton surmonté de deux ailes et autour duquel s'enroulent deux serpents, devient un sceptre qui rend son porteur inviolable, donc in-vi-o-lé impossibilité renforcée par la diérèse. [...]

[...] Sphinx = sphinx colossal de Gizeh, taillé dans le roc et couché dans le sable du désert Pose la question de l'énigme de l'homme (soif de vérité), forme muette, défendu de parler autrement que par sa présence, Ange (face d'homme), aigle, lion, taureau (corps d'une bête ailée et rugissante) Oedipe résout l'énigme du sphinx (recherche sur la vérité de l'homme) Créature mythologique, d'origine égyptienne, tête humaine, corps de lion, ailes d'aigle (Scorpion) Acier = dur, insensible (alliage de fer et de carbone) couleur = terne ? Diamant = pierre précieuse la plus dure, la plus brillante, incolore (carbone), froid ? [...]