Jean Anouilh est un écrivain et dramaturge français, né le 23 juin 1910 à Bordeaux (Gironde) et mort le 3 octobre 1987 à Lausanne (Suisse). Son oeuvre théâtrale commencée en 1932 est particulièrement abondante et variée : elle est constituée de nombreuses comédies souvent grinçantes et d'oeuvres à la tonalité dramatique ou tragique comme sa pièce la plus célèbre, Antigone, réécriture moderne de la pièce de Sophocle (...)
[...] Avec mes ongles cassés et pleins de terre et les bleus que tes gardes m'ont fait aux bras, avec ma peur qui me tord le ventre, moi je suis reine. CRÉON - Alors, aie pitié de moi, vis. Le cadavre de ton frère qui pourrit sous mes fenêtres, c'est assez payé pour que l'ordre règne dans Thèbes. Mon fils t'aime. Ne m'oblige pas à payer avec toi encore. J'ai assez payé. ANTIGONE - Non. Vous avez dit oui Vous ne vous arrêterez jamais de payer maintenant ! CRÉON, la secoue soudain, hors de lui. - Mais, bon Dieu ! [...]
[...] Il faut pourtant qu'il y en ait qui mènent la barque. Cela prend l'eau de toutes parts, c'est plein de crimes, de bêtise, de misère Et le gouvernail est là qui ballotte. L'équipage ne veut plus rien faire, il ne pense qu'à piller la cale et les officiers sont déjà en train de se construire un petit radeau confortable, rien que pour eux, avec toute la provision d'eau douce, pour tirer au moins leurs os de là. Et le mât craque, et le vent siffle, et les voiles vont se déchirer, et toutes ces brutes vont crever toutes ensemble, parce quelles ne pensent qu'à leur peau, à leur précieuse peau et à leurs petites affaires. [...]
[...] Mais Antigone refuse ce décret. Le passage qui nous intéresse ici se trouve au centre de la pièce et oppose Antigone et Créon, alors qu'il tente de la raisonner pour ne pas avoir à la faire tuer. Antigone, qui dénie à son oncle le droit de porter le titre de Roi, se pose en tant que reine alors que Créon va tenter de lui présenter ce qu'est son rôle et son statut de Roi. Anouilh va ainsi opposer la liberté d'Antigone et l'ordre établi, apportant un message symbolique pendant l'année la plus noire de l'Occupation. [...]
[...] Extrait choisi pour l'oral de français, Antigone d'Anouilh CRÉON, sourdement. - Eh bien, oui, j'ai peur d'être obligé de te faire tuer si tu t'obstines. Et je ne le voudrais pas. ANTIGONE - Moi, je ne suis pas obligée de faire ce que je ne voudrais pas! Vous n'auriez pas voulu non plus, peut-être, refuser une tombe à mon frère ? Dites-le donc, que vous ne l'auriez pas voulu ? CRÉON - Je te lai dit. ANTIGONE - Et vous lavez fait tout de même. [...]
[...] Il y a également une remise en question de la notion de liberté. Antigone est la liberté incarnée, elle vit ses choix tandis que Créon doit respecter les lois et l'ordre établi. Pauvre Créon ! Avec mes ongles cassés et pleins de terre et les bleus que tes gardes m'ont faits aux bras, avec ma peur qui me tord le ventre, moi je suis reine. Présentée en 1944, cette pièce peut être comprise comme un message encourageant la Résistance. Antigone reste un personnage tragique et suit sa terrible destinée qui la dépasse, mais elle luttera jusqu'à la mort. [...]
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