Le nom de Bossuet évoque généralement le sermonneur ou l'orateur religieux beaucoup plus que l'homme de lettres qui s'intéresse aux problèmes de langue ou de style.
Dans ce texte, c'est l'académicien qui prend la parole quand la «docte assemblée» lui a ouvert ses portes... Le 8 juin 1671, l'Académie était en fête ; elle recevait parmi ses membres le grand prélat... Une simple lettre de Valentin Conrart, secrétaire perpétuel, datée du 22 mai, informait l'évêque de Condom de son élection. Quinze jours après le récipiendaire fut présenté à la vénérable assemblée. Le directeur en exercice, Charpentier, exprime la joie de l'Académie de recevoir un personnage aussi illustre.
Bossuet prit la parole. Son discours frappa par la vigueur de ses idées. Après les remerciements aux académiciens, l'éloge de Richelieu, fondateur de l'Académie, le nouveau membre aborde le fond de son sujet.
Dédaignant les éloges fades et pesants qui sont ordinairement les sujets de ces sortes de discours, Bossuet a jugé à propos de traiter un thème digne de sa plume et digne de l'académie.
[...] Ce que Bossuet prône par-dessus tout, et ce qu'il admire chez ses contemporains c'est la justesse, ce naturel tant prisé par les classiques qui proscrit tout exagération, qui estime tout à sa juste valeur, qui ne fait pas grand ce qui est petit, ni petit ce qui est grand, autrement dit un style où l'hyperbole et la litote n'ont pas de place ; un style qui s'interdit les «fausses fenêtres» et qui se soucie d'employer une langue sobre et juste plutôt que de faire des «figures justes». C'est ce besoin de justesse qui a expulsé de la langue classique l'affectation et la bassesse : deux défauts de la langue préclassique (...)
[...] Dédaignant les éloges fades et pesants qui sont ordinairement les sujets de ces sortes de discours, Bossuet a jugé à propos de traiter un thème digne de sa plume et digne de l'académie. Il faut à l'éloquence, qui célèbre les actions des grands hommes, une langue fixe et durable. C'est ce que le Cardinal a compris en créant conseil réglé» pour codifier la langue et réprimer les bizarreries de «l'usage» que l'on considérait jusque-là comme le maître du langage. C'est là que se place le développement que nous avons à commenter. La première phrase de notre texte révèle le disciple, l'admirateur des Anciens. [...]
[...] Délicatesse, pureté, majesté. Nous sommes là devant les trois substantifs qui caractérisent la langue classique n'est-ce point surtout à Corneille et à Racine que nous reportent ces vocables. Quoi de plus délicat que la Priere d'Iphigénie ou la supplique d'Andromaque ? . Existe-t-il de propos plus élevés et plus nobles que ceux du vieil Horace? . [...]
[...] Bossuet rend hommage à la perfection de la langue grecque et de la langue latine. Mais il pense avec la Pléiade que la langue française est capable de produire des œuvres immortelles sans emprunter le langage des Grecs et des Romains. Après ce préambule, la politesse exigeait que Bossuet fût allusion aux écrits de ses nouveaux confrères et qu'il vantât les qualités de la langue du XVIIe siècle devenue à son avis l'égale des langues anciennes Mais quels pouvaient bien être en 1671, les ouvrages joignant la délicatesse et la pureté attique à la majesté romaine? [...]
[...] L'affectation, en voulant viser trop haut, raffine subtilisé. Elle se complaît dans les allusions trop ingénieuses et dans les analyses trop poussées ; elle engendre l'afféterie : ou bien elle gesticule déclame, remue ciel et terre ; et affectant un héroïsme ridicule, elle engendre Matamore. Quant à la bassesse, elle rampe dans les ornières de la médiocrité et les bourbiers du vice. Elle ôte toute élévation au style, travestit Virgile et accouple à la poésie des épithètes péjoratives ou injurieuses telles que «burlesque», «bachique», «érotique». [...]
[...] maniérisme avait pour cause les marinismes images pleines d'afféterie, qui émaillaient le style précieux du poète italien marine et qui eurent une grande influence sur la langue française au début du XVIIe siècle. Madame de La Fayette, la Princesse de Clèves. avouer son amour, Chimène lui dit avec beaucoup de retenue : Va, je ne te hais point. «Quelle prodigieuse distance, s'écrie La Bruyère, entre un bel ouvrage et un ouvrage parfait et régulier.» Ce paragraphe où Bossuet décrit le cheminement de la langue française rappelle celui de TOUCHET. [...]
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