Avant La recherche, Proust a écrit un certain nombre d'œuvres qui ont pour motif, bien souvent, l'amour et la jalousie et qui sont des récits à la troisième personne alors que la Recherche est un récit à la première personne (« longtemps, je me suis couché de bonne heure »). Titres de ces œuvres : L'indifférent, La fin de la jalousie... Proust avait commencé un long roman considéré comme un premier brouillon de La recherche : Jean Santeuil. La préoccupation amoureuse est déjà au cœur des préoccupations de Proust avant qu'il n'entame La recherche.
[...] Ils ne sont pas de l'ordre de l'explicite, mais de l'ordre de l'implicite, et donc toujours à interpréter et à déchiffrer. Exemple de Swann : il déchiffre très bien les signes mondains quand il est dans son monde : chez les Guermantes. Mais il n'est pas pertinent pour déchiffrer les signes des Verdurin, ce qui le conduira à son exclusion. La modestie de Swann qui convient chez les Guermante n'est pas de rigueur chez les Verdurin. Enfin, il décrypte très mal les signes lorsqu'il s'agit du sentiment amoureux. [...]
[...] Quand il reconnaît ce moulage dans Bérénice, il y a le même phénomène que chez Swann. Le manque est un élément essentiel du désir de Swann Après que Swann soit tombé amoureux commence le temps de l'idylle. Swann craint toujours une lassitude à venir. Aussi voit-il Odette à petites doses pour prévenir sa lassitude selon une loi d'Airain : ce qu'on peut obtenir sans problème est du même coup moins désirable. Dès qu'il peut voir Odette sans frein, son désir est entravé. Swann ne va donc voir Odette que de façon à préserver ses sentiments. [...]
[...] Cette personne peut être tout à fait banale pour quelqu'un d'autre, et on n'est pas obligé d'accorder valeur à l'ensemble de la personne (on peut tomber amoureux d'une silhouette, d'une intonation). Dans Un amour de Swann, Proust ne prononce jamais le terme stendhalien de cristallisation. Or, l'amour de Swann pour Odette va cristalliser sur la reconnaissance partielle de la Zéphora en elle. Proust infléchit la cristallisation stendhalienne de deux façons : dans le sens d'une radicalisation esthétique et en vidant cette cristallisation de son pouvoir euphorique d'illusion. [...]
[...] Qu'est-ce qui permet de les associer dans la musique ? Elle se fait par la situation d'écoute : Swann, par son imagination et sa sensibilité musicale, compose à partir de la phrase une scène fictive qui comporte deux éléments qui produisent chez Swann le même effet que Zéphora. Le premier élément de cette scène fictive est l'esthétique baudelairienne de la petite phrase, c'est-à-dire le fait que ce qui plait à Swann et le perturbe en même temps, c'est le fait que cette petite phrase ne fait que passer. [...]
[...] En étendant le cas d'Odette à notre rapport au monde, on peut considérer qu'on ne voit le monde que par fragments. Il y a une surdétermination de la fenêtre dans Un amour de Swann. La jalousie est un sentiment mauvais, rongeur, qui développe des capacités imaginatives qui torturent de doute le jaloux, mais c'est aussi un type de fenêtre, volet qui permet de voir sans être vu (Le barbier de Séville à lire : perspective de la double jalousie : volet et sentiment. [...]
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