Guillaume Apollinaire est un poète de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle. Il est considéré comme le chantre des principales avant-gardes artistiques, notamment le cubisme, comme poète et théoricien de l'Esprit nouveau, et précurseur du surréalisme dont il a forgé le nom. Son œuvre littéraire fut très hétéroclite et composée de contes, textes dramatiques, pièces de théâtre et recueils poétiques, dont Alcools paru au Mercure de France en avril 1913 et composé entre 1898 et 1913.
"La Chanson du Mal-Aimé", achevée en 1904, fait partie d'un ensemble de sept textes dont le titre emblématique symbolise l'amour malheureux qui est au centre de la thématique du recueil. Notre extrait composé des 25 premiers vers du poème raconte qu'un soir de brouillard à Londres, l'amant croit voir venir vers lui l'objet de son amour. Il ne s'agit hélas que d'un « voyou » qui ressemble à l'aimée. Le narrateur le suit néanmoins comme si l'individu devait le mener vers la femme pour laquelle il réaffirme sa passion. Il fait alors une deuxième rencontre, celle d'une femme ivre qui, présentant le visage dégradé de son amour, lui en révèle la fausseté.
[...] Ainsi la demi-brume (mois de septembre), le soir, le brouillard forment une atmosphère irréelle voire fantastique. Les caractéristiques des personnes, l'un voyou et mauvais garçon l'autre soule et tous deux vivant la nuit, contribuent également à en faire des personnages inquiétants. Nous sommes dans un univers à mi-chemin entre la réalité et le rêve. Apollinaire situe son lyrisme amoureux dans un monde urbain et un milieu populaire, c'est-à-dire qu'il transpose une réalité de la vie quotidienne dans un univers de poésie. [...]
[...] Ainsi en est-il de chacun des premiers vers de chaque strophe : Un/ soir/ de/ de/mi/brume Londres Je/ sui/vis/ ce/ mau/vais/ gar/çon Que/ tom/bent/ ces/ va/gues/ de/ briques Au/ tour/nant/ d'u/ne/ rue/ brû/lant C'é/tait/ son/ re/gard/ d'i/nhu/maine L'octosyllabe est le vers simple le plus long et c'est le vers le plus ancien datant du Xe siècle. Dans sa construction il n'oblige pas à la césure comme l'alexandrin. Son choix par Apollinaire relève donc d'une volonté de ne pas innover sur ce plan. Ce qui facilite le désir de conférer au poème une certaine musicalité et harmonie (à l'inverse des vers impairs ou libres convenant à l'expression de sentiments complexes). Ensuite les quintils vers) d'octosyllabes sont naturellement rimés. Ces rimes au sein des strophes sont construites autour d'un a/b/a/b/a. [...]
[...] C'est ainsi que La Chanson du Mal-Aimé se donne donc d'emblée comme un poème de fin d'amour et même de fin de tout amour (coïncidant avec une période de désenchantement de vie personnelle du poète qui ne prendra fin qu'avec la rencontre de Marie Laurencin en 1907). Mais c'est aussi un poème lyrique dont il convient d'examiner l'originalité formelle. II/ La forme poétique : les variations du lyrisme Les traits de la poésie lyrique traditionnelle Ce début de la Chanson observe certaines des règles de la poésie lyrique traditionnelle, plus précisément le choix d'octosyllabes, de rimes régulières pour exprimer des sentiments personnels par un chant douloureux. [...]
[...] Il est intéressant de resituer notre poème dans l'œuvre très hétéroclite que fut Alcools d'Apollinaire. En effet notre extrait qui entrelace les thèmes du sentiment amoureux et de l'illusion nous suggère alors des pistes de lecture susceptibles d'éclaircir le recueil dans son ensemble. Celui-ci peut être considéré comme le grand poème des amours impossibles chantés par un mal-aimé qui n'évoque les joies d'un amour partagé que de manière nostalgique ou douloureuse et ceci par une écriture qui s'inscrit dans la tradition poétique tout en la renouvelant. [...]
[...] Il fait alors une deuxième rencontre, celle d'une femme ivre qui, présentant le visage dégradé de son amour, lui en révèle la fausseté. Nous étudierons l'originalité de ce poème en deux axes. D'abord nous verrons comment le lexique, les images contribuent à passer de l'illusion à la désillusion amoureuse. Nous présenterons ensuite en quoi le lyrisme d'Apollinaire renouvelle le genre. De l'illusion à la désillusion Les deux phases successives de cet extrait onirique sont celles du passage de l'illusion à la désillusion, à travers le médium de la ressemblance. La première phase de l'illusion Elle concerne les trois premières strophes. [...]
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