Les hommes du XIXe siècle avaient cru au progrès, qu'ils tenaient pour pleinement assuré.
Comment Alain, engagé volontaire pendant la guerre de 1914-1918, né en 1868, marqué par la philosophie de Descartes, aurait-il pu laisser passer ce qui constituait, à ses yeux, une telle naïveté historique sans réagir ? (...)
[...] Ces conditions, le texte ne les énonce pas de manière positive, elles sont seulement implicitement supposées par la critique d'une certaine philosophie de l'Histoire. C'est pourquoi, il nous semble opportun de préciser quelque peu les doctrines rejetées par Alain afin de mieux comprendre sa propre idée du progrès. La critique d'Alain atteint au premier chef les grandes philosophies de l'Histoire élaborées au XIXe siècle. Les plus fameuses sont celles de Hegel et de Marx. Hegel affirme avec puissance la rationalité de l'Histoire (cf. [...]
[...] Belle image du progrès. Mais pourtant elle ne me semble pas bonne. Ce que je vois de faux, dans cette image, c'est cette route tracée d'avance et qui monte toujours; cela veut dire que l'empire des sots et des violents nous pousse encore vers une plus grande perfection, quelles que soient les apparences; et qu'en bref l'humanité marche à son destin par tous moyens, et souvent fouettée et humiliée, mais avançant toujours. Le bon et le méchant, le sage et le fou poussent dans le même sens, qu'ils le veuillent ou non, qu'ils le sachent ou non. [...]
[...] Analyse linéaire (rédigée succinctement) Alain commence par énoncer l'idée qu'il va critiquer: on se représente mal le progrès en y voyant une "route en lacets qui monte." L'image d'une route en lacets qui monte est une "belle image" certes: elle évoque bien l'idée d'un cours de l'Histoire qui, pour sinueux qu'il soit, n'en est pas moins orienté vers un état meilleur du monde, symbolisé par l'altitude supérieure à laquelle conduit la route. Mais, pour belle qu'elle soit, l'image est trompeuse. C'est ce qu'Alain veut faire comprendre au lecteur. Il le montrera en commençant par identifier les présupposés de l'idée - qu'il déclare fausse d'emblée - que l'image de la route exprime, de manière à expliquer pourquoi il ne saurait lui-même y adhérer, ainsi qu'il le reconnaîtra finalement. [...]
[...] Soyons gré à Alain de nous avoir conduit à cette prise de conscience. Conclusion Croire à une "route en lacets qui monte", voilà qui eût pu nous paraître admirable. Il a suffi qu'un philosophe, Alain, fasse d'une telle foi l'objet de son attention lucide pour que nous ne nous laissions pas prendre à la beauté trompeuse d'une apparence séduisante mais paresseuse ! Il dépend de nous, pour une part, qu'un avenir meilleur s'ouvre à nous. Mais, pour les mêmes raisons, il peut se faire aussi que le pire survienne, si nous n'y prenons pas garde. [...]
[...] Les différents stades de cette évolution ne sont plus comme chez Hegel des figures de l'esprit mais des "modes de production" (ex.: féodalité, capitalisme . La dialectique hégélienne est transposée sur le plan matériel : les contradictions d'un système économique et social rendent inévitable l'avènement du système suivant. Ainsi, le passage du capitalisme au socialisme puis plus tard au communisme apparaît pour Marx comme un "progrès fatal" On opposera, tout d'abord, à cette conception hégélienne ou marxiste de l'Histoire, le caractère contingent du progrès. Il n'est pas une fatalité mais une possibilité qu'il appartient aux hommes de rendre effective. [...]
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