Nous allons aujourd'hui nous pencher sur le poème Calendrier lagunaire, premier poème de l'ensemble intitulé "Moi, Laminaire", ensemble publié en 1982. Avant même d'aller plus avant dans la lecture de notre texte, celui-ci nous offre d'emblée plusieurs pistes de lecture qu'il est important de ne pas négliger. La première, c'est ce court texte en prose qui précède notre poème, texte qui place la parole poétique à un carrefour spatio-temporel, en lutte avec des forces métaphysiques qui la dépasse, "la vie et la mort", "la ferveur et la lucidité", "le désespoir et la retombée". Etant donné que ce court texte précède l'attaque de notre poème, il est important de garder ces problématiques en mémoire. Notre seconde piste, est, elle, quelque peut macabre, mais toutefois éclairante : les trois derniers vers de Calendrier Lagunaire sont ceux, parmi tous les autres, que Césaire a choisi lui-même de placer en épitaphe sur sa tombe : [lecture] cela ouvre nombre de questions ; questions auxquelles nous tâcheront de répondre. Troisième piste mais non la moindre, Césaire évoque dans ses entretiens le recueil "Moi, laminaire" comme, je cite, "le temps d'un bilan définitif." : "C'est un aboutissement, un aboutissement de quelque chose qui a commencé il y a maintenant plus de cinquante ans." Cet aboutissement, ce temps de l'acquis, se lit dès le titre du recueil : "Moi", séparé par une virgule de "laminaire". Le terme "laminaire" est polysémique, nom féminin, il est une algue brune dont les racines s'attachent fortement aux rochers ; adjectif, il devient ce qui, composé de lamelles parallèles, s'effectue par glissement de couches les unes sur les autres. Ce "moi", devient alors racines, mais peut aussi être lu comme ces multiples couches parallèles enfin réunies par glissement. La virgule, quant à elle, peut induire soit une séparation, une déchirure du "moi", soit au contraire une réunification salvatrice. C'est sous cette égide que naît notre poème (...)
[...] Ce titre est déjà largement évocateur. D'un côté, le calendrier, avec toute sa charge sémantique programmatrice, et sa richesse étymologique : issu du latin calendae [...]
[...] II- REPLIS ET CONFINEMENT DE LA PAROLE POETIQUE J'habite donc une vaste pensée : le premier vers de ce second mouvement nous apparaît comme un résumé, presque didactique, de la parole qui a précédé. Le poète explicite sa pensée préalable : la conjonction de coordination donc vient confirmer cette hypothèse, renforcée par la présence de l'immensité, avec la vaste pensée Mais le plus souvent je préfère me confiner : la présence de la conjonction mais opère la bascule vers le temps du confinement : il s'agit d'une reprise de la parole poétique préalable, d'une prise de conscience d'une quête identitaire qui ne peut se jouer dans le déploiement, mais dans le repli. [...]
[...] L'auditeur entend ce retour et prête alors attention aux modifications qu'il implique. (lire exemple) Il s'agit d'un procédé d'épanorthose, dont Césaire use tout au long du poème, et qui lui donne de vagues allures de litanie. Enfin n'oublions pas l'omniprésence du je lyrique, en position tonique dans ces 11 vers, et qui plus actant : je affirme son ancrage, sa tentative d'enracinement, qui, nous allons le voir, se veut minée de l'intérieur par une fuite vers l'abstraction qui empêche tout arrêt définitoire. [...]
[...] Même dans le repli, le poète ne semble trouver que des racines mortes, des figures vitales privées, justement, de leur vitalité. S'ajoute à cette stérilité un second phénomène lexical qui se répand, lui aussi, dans tout ce mouvement : la figure de la partie d'un tout En effet, le poète tente de concilier avec, nous l'avons dit, l'hybridité de sa culture et l'impossibilité de trouver ses racines ; or, ce problème d'hybridité semble à nouveau resurgir ici. Le poète ne peut se trouver lui- même qu'en partie dans la figure du repli, et ce manque à combler, cette impossible complétude se traduit par, justement, des figures de l'incomplétude : j'habite une formule magique, les seuls premiers mots, tout le reste étant oublié le pan d'un grand désastre l'auréole des cactacées La mention de l'oubli, ici, peut très bien référer aux racines africaines, oubliées en Martinique, tellement oubliées que c'est à Paris que le poète, Césaire, va en prendre connaissance. [...]
[...] La première, c'est ce court texte en prose qui précède notre poème, texte qui place la parole poétique à un carrefour spatio-temporel, en lutte avec des forces métaphysiques qui la dépasse, la vie et la mort la ferveur et la lucidité le désespoir et la retombée Etant donné que ce court texte précède l'attaque de notre poème, il est important de garder ces problématiques en mémoire. Notre seconde piste, est, elle, quelque peut macabre, mais toutefois éclairante : les trois derniers vers de Calendrier Lagunaire sont ceux, parmi tous les autres, que Césaire a choisi lui-même de placer en épitaphe sur sa tombe : [lecture] cela ouvre nombre de questions ; questions auxquelles nous tâcheront de répondre. Troisième piste mais non la moindre, Césaire évoque dans ses entretiens le recueil Moi, laminaire comme, je cite, le temps d'un bilan définitif. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture