Acte V, scène 1 (v. 1497 à 1536) de "Rodogune", Corneille

Résumé du document

Vengeance, pouvoir et gloire sont les caractéristiques principales des héros cornéliens, dont l'honneur prend le plus souvent le dessus sur la vertu. Ainsi la gloire dicte-t-elle à Horace de tuer sa sœur, ainsi la gloire dicte-t-elle à Cléopâtre de tuer ses propres fils. Dans Rodogune ou la Princesse des Parthes, Cléopâtre est en effet animée du profond désir de se venger de Rodogune, maîtresse de son défunt mari. L'extrait étudié introduit le dernier acte de la pièce, suite au meurtre du premier des deux jumeaux, Seleucus, par Cléopâtre. Ce dernier acte propose un monologue de cette dernière, nous dévoilant ainsi toute la manipulation dont Cléopâtre est capable pour arriver à ses fins. Il s'agit de comprendre comment ce dernier monologue de Cléopâtre montre toute la perfidie et l'avidité d'honneur de celle-ci.

Extraits

[...] IV Exaltation du désir de vengeance : aucun compromis n'est possible - Vengeance et Justice : Les vers 1525 à 1529 établissent une gradation dans le désir de vengeance de Cléopâtre. C'est le vers 1529, volontairement repoussé, qui est l'acmé de cette gradation. Le subjonctif imparfait établit la supposition de ce que pourrait subir Cléopâtre en contrepartie de sa vengeance, tout en montrant qu'il s'agit de conséquences auxquelles Cléopâtre n'accorde aucune importance et qui ne parviendront pas à la dissuader : la gradation suit un mouvement de bas vers le haut. [...]

[...] Elle le désigne d'ailleurs non pas par son prénom, mais par une périphrase : l'époux de Rodogune C'est la condition de son fils plus que son fils lui-même qu'elle rejette. L'effet dilatoire qui repousse la condition de ce refoulement au vers 1514 S'il m'arrache du trône et la met en mon rang permet de mettre en valeur l'intérêt qu'a Cléopâtre pour le trône et la haine qu'elle conserve pour Rodogune. - Le dialogue avec un fils indigne : Après s'être adressée avec espoir et gratitude au Poison et au Fer, Cléopâtre s'adresse à son fils. [...]

[...] O toi [ ] par qui deux amants vont d'un seul coup du sort vont recevoir [ ] la mort Cléopâtre se désolidarise du moyen : elle supervise, elle n'agit pas : Le fer m'a bien servie, en feras-tu de même ? Fer et poison sont les auxiliaires de Cléopâtre. - Dévoile et anticipe : mort de Seleucus et moyen de tuer Antiochus et Rodogune. En effet, plan diabolique de Cléopâtre se met en place. On apprend le moyen qui a produit la mort de Seleucus : Le fer m'a bien servie Mais surtout, comme nous l'annonçaient les premiers vers, elle nous révèle ce qui causerait la mort de Antiochus : le Poison. [...]

[...] Caractère inachevé de la vengeance marqué par le gérondif : en attendant et la caractéristique à demi - Côté manipulateur de Cléopâtre : elle planifie tout, prévoit le parfait achèvement de sa vengeance dans ces vers introducteurs, comme le montrent les modalisateurs déjà au vers 1499 bientôt au vers 1502 de même que les verbes préparé et promettre qui montre tout le machiavélisme de Cléopâtre. Le futur ils le suivront v la coordination de but pour et l'allitération en aux vers 1501-1502 renforcent également cette détermination. - Ces six premiers vers annoncent non seulement l'action de l'hors scène, mais également les projets de Cléopâtre dans l'acte V. Le spectateur est mis dans la confidence de la préméditation de Cléopâtre. Ils annoncent également la suite du monologue : Cléopâtre explique ce qu'elle prépare, pourquoi et ce qui l'y pousse. [...]

[...] Cléopâtre s'en remet à ces châtiments, trop attachée à sa soif de gloire et de pouvoir. Elle reconnaît son offense, mais ne peut ou ne veut s'y soustraire. - Le poids du destin. Cléopâtre se résigne par ailleurs au destin tragique qui peut l'attendre face à la justice divine : on retrouve en effet les images célestes : un coup de tonnerre et donc une décision divine, un destin écrasant comme punition pour ses offenses. Cléopâtre y est résignée, comme le montre la répétition de il vaut mieux aux vers 1530 et 1531. [...]