Le sonnet retrace ici une rencontre éblouissante, une femme juste aperçue, figure de la ville rendue plus émouvante encore par son deuil, et le caractère fugitif d'un échange de regards. Le poème est construit sur la présence de deux personnages et sur l'antithèse de la lumière et de l'obscurité, de l'espoir et du désenchantement (...)
[...] Seul son allure et son regard sont évoqués. Le passé simple passa vers 3 montre la rapidité de l'action. La disparition : la nuit vers 9 est exprimée essentiellement dans les deux tercets, connotation négative puisqu'il s'agit de la fin de l'apparition, la disparition du regard la disparition de la passant et de l'espoir vers 11 ne te verrais-je plus que dans l'éternité ? et le vers 14. Dans les vers de nombreux termes évoquent le départ, la fuite, un ailleurs temporel ou spatial : trop tard ! [...]
[...] Il devient une sorte de pivot auquel se rattache la scène racontée : la silhouette féminine émerge d'un anonymat collectif représenté par la rue et provoque le coup de foudre ; dès lors le poète devient un témoin, un admirateur, sensible à la puissance magique du regard de la femme vers 10 et enfin un amant abandonné : en effet, dans les vers 10 à 14 on remarque l'alternance d'un je et d'un tu : une sorte de dialogue au- delà des mots : le poète dresse le bilan de la rencontre, ce qu'elle aurait pu être : vers 14, première hémistiche ô toi que j'eusse aimé, ô toi qui le savais ce qu'elle ne saura pas Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais vers 13. La passante : Elle occupe les vers et 8. Son allure générale : une impression d'harmonie, d'équilibre grâce au rythme utilisé notamment grâce à l'enjambement du vers 3 au vers 4. [...]
[...] Cette phrase minimale restitue l'illumination éprouvée par le poète, la puissance du phénomène. La beauté permet deux expériences invivables pour l'homme : la naissance et l'immortalité. (cf. vers : beauté renaître éternité La beauté est l'expérience de l'absolu, un instant éternisé : la rencontre passagère devient expérience de l'éternel. Ainsi, cette femme représente l'allégorie du Beau, de l'inspiration poétique à peine entrevue, déjà disparue. Baudelaire relate ici un coup de foudre dans un milieu urbain ; cette rencontre éphémère prend la dimension d'une aventure romanesque, exaltante : mais la chute d'une brutalité forte montre la défaite, la promesse inaboutie d'un amour passionné ; on peut également lire ce poème comme une ouverture, certes éphémère sur le Beau. [...]
[...] À une passante La rue assourdissante autour de moi hurlait. Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse, Une femme passa, d'une main fastueuse Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ; Agile et noble, avec sa jambe de statue. Moi, je buvais, crispé comme un extravagant, Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan, La douceur qui fascine et le plaisir qui tue. Un éclair puis la nuit ! Fugitive beauté Dont le regard m'a fait soudainement renaître, Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ? [...]
[...] III) La femme : allégorie de la poésie La femme semble être une médiatrice : elle semble initiée aux mystères humains de la mort et de l'amour : grand deuil douleur majestueuse et de l'amour ô toi que j'eusse aimé, ô toi qui le savais vers 14. La femme est un être de vie et de mort, elle est métamorphosée en puissances surnaturelles vers 7 : elle porte en elle le germe de la naissance et de l'ouragan. Sa relation avec l'au-delà se fait par le motif de l'œil au vers 7. L'œil permet le passage du visible à l'invisible. C'est un lieu de profondeur, de mystère. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture